L’inspecteur Charlie Northern est enquêteur privé pour Scotland Yard et cultive un goût sur pour la répartie cinglante. Passionné de théories du complot, cet ancien enfant de chœur a perdu la foi après qu’un violeur en série a massacré ses parents. Aussi est-il troublé quand son vieil ami Marcel Leclair, cardinal au Vatican, vient le trouver pour lui demander d’enquêter sur la mort suspecte de William Richleau, leur mentor du temps où le catholicisme trouvait encore grâce à ses yeux.
Appelé à devenir Pape, Richleau se serait suicidé en sautant sur les grilles en bas de sa chambre… chose difficile à avaler s’agissant d’un homme d’église qui plus est handicapé. Plus troublant, un homme aurait essayé de le poignarder en psalmodiant du latin après qu’il ait pourtant passé l’arme à gauche. Le cardinal Toscianni a l’air de jouer un jeu trouble et des rumeurs sataniques circulent au sein du Vatican. Northland va avoir du pain sur la planche pour démêler cette histoire et devra replonger dans des souvenirs qu’il aurait préféré oublier.
On avait découvert le dessinateur mexicain Humberto Ramos sur "DV8", l’alter-égo trash de "Gen13" il y a quelques années. Son style était encore loin de faire l’unanimité et nombre de lecteurs critiquaient son goût pour les yeux et les pieds hypertrophiés peu réalistes. Cependant, avec "Crimson" et "Out There" (ses créations), il a fini par trouver son style et à s’imposer comme un artiste à la carrière prometteuse avec lequel il faut compter.
Avec "Révélations", il fait la preuve de son talent, notamment pour les ambiances, bien secondé par l’excellent travail de son coloriste Leonardo Olea (qui a collaboré à "Ashes" et "Kookaboora K", également publiés chez Soleil). Chaque personnage a un caractère propre et affirmé, dans une vraie tradition des comics et à contre-pied de l’hyper réalisme de beaucoup de productions actuelles : un parti pris rafraîchissant. Et même si jusqu’ici le travail de Ramos n’a pas toujours été exempt de tout défaut, difficile de reprocher à "Révélations" quoi que ce soit graphiquement : le dessin est léché, les couleurs de Leonardo Olea étant parfaitement adaptées, donnant ainsi au scénario de Jenkins l’écrin dont il avait besoin pour briller.
Paul Jenkis (scénariste britannique ayant travaillé sur "Hulk" et "Wolverine" pour Marvel, "The Darkness" pour Top Cow et "Hellblazer" pour DC Vertigo) livre avec "Révélations" un polar paranoïaque où flotte un parfum d’ésotérisme trouble. Maitrisant le genre, il en utilise les poncifs avec intelligence pour faire plonger le lecteur dans l’ambiance déstabilisante des coulisses du Vatican.
Il fait de Charlie Northern un antihéros certes classique mais vraiment attachant : inspecteur solitaire accro à la clope et aux théories du complot, il s’avère être peu soucieux du qu’en dira-t-on, aussi rusé que manipulable et habité par des démons qu’il tente de chasser depuis des années. Il guide le lecteur dans les méandres de cette intrigue où les faux-semblants sont aussi nombreux que les meurtres. Le rythme est impeccable et implacable, les phases d’action judicieusement entremêlées aux périodes d’intrigue.
On cherche en même temps que Charlie ce qui se cache derrière cette histoire, les raisons de l’empressement du Vatican à l’étouffer. Jenkins triture les méninges de son héros au point que cela en devient une obsession. Il bute, trébuche, hésite, s’arrache les cheveux en allant de fausse piste en fausse piste. Dans sa fuite en avant, il entrainera malgré lui Lucille Pellicia une jeune Romaine en charge de la comptabilité du Vatican et son vieux pote Todger le légiste. Doit-il écouter les mises en garde de Toscianni ou suivre les conseils du mystérieux personnage qui l’encourage à persévérer dans sa quête de la vérité ? A trop vouloir connaitre le fin mot de l’histoire, Charlie ne risque-t-il pas gros ?
S’il n’y avait eu cette fin frustrante (je n’en dirai pas plus), on aurait eu entre les mains un sans faute : l’histoire, le ton, le dessin, les couleurs, les personnages, tout était présent pour que "Révélations" devienne un incontournable. On peut également regretter que l’histoire ne se prolonge pas et qu’elle laisse le lecteur un peu circonspect après la révélation finale. Pour autant, cela ne doit pas occulter le fait que le tandem Jenkins-Ramos (avec Olea aux couleurs) nous a livré une excellente bande-dessinée doublée d’un très bon polar.
zaaor
Le 23/08/2007 à 04:56:55
N'étant pas une fan de comic books, il est certain que je suis assez néophyte en
ce qui concerne la différence entre le dessin des bd régulières et celui des comic.
Donc ici, je fus épatée par la pertinence des traits, les coloris bien agencés, la
réalité du dessin.
Quant à l'histoire, j'ai eu l'impression de m'être sauvée un roman ésotérique de
quelques 4 ou 500 pages tel Da vinci code, Le troisième secret ou tout autre titre
de ce genre en lisant les deux albums en une seule petite heure.
J'ai plongé dans l'intrigue qui ne réinvente pas la roue mais au fur et à mesure
qu'elle avançait, je ressentais un certain bien-être à trouver cela bon malgré
tous les clichés inhérents à ce genre d'histoire. Twist ending tout à fait horrible,
fin qui n'est rien comme celle que devrait être les contes de fées...
J'ai aimé qu'on ne fasse pas dans le mielleux. C'est tout à l'avantage du
scénariste.
C'est une bd que j'aurai plaisir à relire de temps à l'autre, à l'image du Troisième
testament et autre bd ésotérique,