Le 12/12/2023 à 19:00:03
Yo ! Quand le rap dérape, ça finit en ball-trap. Les auteurs nous proposent un plongée dans un groupe de rap français, 'BM20', qui va accéder à la gloire et découvrir les sinistres rouages de l'industrie musicale. De la banlieue du XXème aux concerts à guichets fermés en Afrique et aux Etats-Unis, le déroulé est très classique: des hits, l'ascension, la gloire, les dissentions artistiques, les paradis superficiels, les querelles amoureuses et la chute bien violente… sur le bitume. La couleur disparaît au bout de quatre pages à partir de l'instant où la bande de joyeux lurons se lance dans un magnifique freestyle devant le stade de l'OM à coups d'insultes et de doigts d'honneur, marquant le début de leur carrière. Il y a un criant sens du naturalisme qui se dégage à chaque page via tout ce qui y est associé à la banlieue et à la culture des racailles (kebab, barres d'immeuble, islam, tags, MJC au service des "nouveaux talents", Snapchiotte, drogues et BAC). Le souci du réalisme est poussé à son paroxysme avec l'emploi des expressions et autres idiomes mélangeant verlan, insultes, anglais, expressions musulmanes, langues africaines et autres fautes d'accord, tombant le plus souvent dans la chinoiserie et l'abscons pour le profane, d'ailleurs il y aurait dû y avoir un glossaire à la fin. Le dessin de Dall'Oglio est influencé par les mangas et cela passe tout seul sur cette histoire. Dommage pour l'absence de couleurs, choix artistique assumé car "la banlieue, c'est pas rose, la banlieue, c'est morose". J'ai bien apprécié ce 'one-shot' illustrant les dangers de l'industrie musicale (le superficiel, les producteurs mais aussi les profiteurs), et apportant un éclairage intéressant sur l'imposture qu'est le rap. Cette musique se révèle finalement n'être qu'un bel écran de fumée associant des actes et "paroles" vulgaires/racistes/misogynes/dangereuses/débiles et autres borborygmes insignifiants, pour une catégorie de personnes ayant un (très) faible niveau d'éducation ou d'exigence. Devant tant de "génie", Brassens, Brel, Apollinaire et autre Flaubert peuvent dormir tranquilles, la relève est bien assurée pour le meilleur et surtout pour le pire. Rien que pour cette passionnante et émouvante plongée dans l'univers des racailles, victimes stigmatisés de la société, et autres artistes urbains au service de l'amour, du respect de la langue française, de la poésie et de la paix envers leur prochain, je mets la note maximale.BDGest 2014 - Tous droits réservés