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uidée par des sentiments amoureux profonds, Rachel Beck, fille d’un des plus influents personnages du royaume, se livre à des ébats sexuels torrides dans une des chambres du Ritz à Paris. La scène compromettante est filmée et utilisée par un conglomérat français afin de faire chanter Colin Beck, son père. Le richissime investisseur s’apprêtait en effet à tourner le dos aux Français pour signer un contrat médiatique lucratif avec British Telecom. Désireux de protéger les intérêts nationaux qui sont en jeu, les Services Secrets britanniques envoient Tara Chace sur place. La motivation de l'agent britannique, qui tente désespérément de remettre sa vie affective sur les rails, passe cette fois outre le "simple" devoir de servir sa Reine et son pays. Des liens d’amitié entre Tara et Rachel ajoutent en effet une dimension fort personnelle à cette nouvelle affaire d’Etat.
Après un premier tome (Queen & Country : Opération Terre brisée) qui permettait de suivre deux enquêtes, l’une au Kosovo et l’autre en Afghanistan, et un deuxième volet (Queen & Country : Opération Crystal Ball) relatant le démantèlement d’un réseau terroriste passant par les Balkans et le Moyen-Orient, Queen & Country : Opération Blackwall se déroule plus près de chez nous. Délaissant le terrorisme international au profit du monde pas beaucoup plus reluisant (et parfois intimement lié) des affaires, cette histoire d’espionnage industriel est surtout marquée par son caractère plus personnel.
Si cette série repose sur des récits indépendants, l’évolution psychologique des personnages au fil des aventures constitue cependant l’un de ses principaux intérêts. En développant cette mission mêlant sexe, mensonges et chantage, en parallèle avec la relation amoureuse qu’entretient Tara avec son collègue vigie pour des raisons souvent mauvaises, Greg Rucka démontre une nouvelle fois son talent de scénariste. Comme dans son autre série, Gotham Central, l’auteur fait déteindre les éléments de chaque enquête sur la vie privé de ses protagonistes.
L’autre atout de cette saga est l’environnement ultra-réaliste dans lequel évoluent les personnages. Le quotidien des sections spéciales britanniques, fait de stress, dépressions, difficultés hiérarchiques et relations tendues, se situe à mille lieues de la vie luxueuse menée par 007, le plus célèbre des agents de la couronne. En soulignant l’incompatibilité totale entre ce job hors normes et une relation affective normale, l’auteur donne beaucoup de profondeur à cette intrigue au demeurant assez classique. Le graphisme noir et blanc de Jason Alexander vient parfaire cette impression de réalisme. En multipliant les non-dits, les regards implicites et les longues pauses, il retranscrit parfaitement les sentiments de ses héros. Le style plus sombre du dessinateur, par rapport à ses prédécesseurs, renforce d’ailleurs l’aspect torturé des différents caractères.
Pendant que Tara Chase continue de protéger les intérêts de Sa Gracieuse Majesté, l’amateur de récits d’espionnage trouve le sien dans la fréquence de publication entretenue par Akileos, avec pas moins de cinq excellents albums en seulement huit mois.
Les avis
voltaire
Le 18/11/2008 à 20:09:42
De méchants agents de la DGSE font chanter un gentil industriel britannique pour l'obliger à implanter son usine en France. Voilà qui risque de priver les Midlands de plusieurs centaines d'emplois. Mais l'quipe des vigies est là en la personne de Tara Chace.
Le traitement n'est pas très original et je me demande encore comment Tara aurait pu mettre la main sur le personnage clé de l'histoire sans le secours de son scénariste, c'est dire.
Mais ce qu'il y a d'intéressant dans cette série est de montrer que les "services" comme on les appelle pudiquement s'occupent aussi des affaires économiques. Ce qui est aussi très intéressant c'est qu'on voit de plus en plus de Français comme méchants dans différents flms, romans et BD.
Merci MM. Bush et Rove. Comme disait Voltaire (le vrai) : "Médisez, médisez, il en restera toujours quelque chose."