Résumé: Contient Jack Kirby’s Fourth World Omnibus Volume 1, soit :
Forever People (1971) #1-3
Mister Miracle (1971) #1-3
The New Gods (1971) #1-3
Superman's Pal Jimmy Olsen (1954) #133-139.
R
arement une scission entre éditeur et auteur aura provoqué un tel séisme : Jack Kirby part chez DC ! Le duo mythique qu’il formait avec Stan Lee créa dans les années 60 quasiment l’intégralité des héros iconiques de Marvel (Thor, les Quatre fantastiques, les X-men et bien d’autres). Ne se sentant pas suffisamment valorisé par la hiérarchie, et à l’aune d’un changement de propriétaire qui n’allait pas arranger la situation, celui que Stan The Man avait surnommé The King prit une décision qui allait changer la face des comics pour toujours : passer chez DC, le concurrent direct. Fort d’une nouvelle liberté artistique, il publie au début des années 70 Le quatrième monde, une saga prenant place dans plusieurs séries, unifiant tout l’univers DC sous la coupe d’une épopée interstellaire.
Il s’agit là de la première innovation de Kirby, qui concrétise la notion de multivers si chère à la branche cinématographique de Marvel depuis Iron Man. Les différentes séries proposées dans ce recueil font écho les unes aux autres, créant un fil rouge qui permet d’asseoir l’ambition du projet. Car même en étant habitué au pan « cosmique » de Marvel avec Galactus et le Surfer d’argent, les aspirations du King en ce qui concerne Superman et ses acolytes sont encore supérieures. Il a l’intention d’installer petit à petit, numéro après numéro, tout un panthéon de nouveaux dieux millénaires, nés des cendres de l’ancien monde. Les forces libérées par ce combat titanesque engendrèrent deux planètes diamétralement opposées : Apokolips et Neo-Genesis. C’est également l’arrivée de Darkseid, méchant emblématique de DC, qui a toujours une importance capitale à l’heure actuelle.
Jack Kirby distille des informations éparses, mais sans en dévoiler trop dans ce premier volume. Sous la forme d’une grande introduction, la menace se fait ressentir progressivement. Si la construction modernise considérablement les canons des comics, l’imagination débordante de Kirby est surtout magnifiée par un trait qui a fait sa renommée chez Marvel. Quasiment toutes les cases sont dynamiques, apportant une fluidité au récit qui a pourtant du mal à avancer sur certains épisodes, souffrant des lourdeurs de l’époque (répétitivité, facilités scénaristiques). Il en va de même pour le dessin, que les nouvelles générations qui n’ont pas grandi avec Kirby auront sans doute du mal à apprécier.
Le quatrième monde se savoure d'autant plus avec du recul historique. Kirby a connu la Seconde Guerre mondiale, et commente celle du Vietnam à travers certains de ses personnages. La jeunesse contestataire de l’époque trouve sa voix parmi les « chevelus » et les « forever people ». Les évolutions technologiques de son temps inspirent aussi l’artiste, les découvertes liées à l’ADN apportant leur lot de mutants et d'hommes nouveaux.
Un cycle typique de la démesure des seventies, rempli de personnages grandiloquents, psychédéliques, de thèmes métaphysiques, politiques, religieux, et qui marqua par sa richesse foisonnante et ses innovations l’industrie du comic book, redéfinissant ses codes. Toutefois, l'âge de l'œuvre se fait ressentir plus d’une fois, rendant la lecture moins accessible pour les non-initiés ou les lecteurs ne connaissant que le DC moderne. En partie inédit en France, ce classique est réédité par Urban sous la forme d’une anthologie accompagnée de bonus passionnants, notamment une préface de Grant Morrison et une postface de Mark Evanier, ancien collaborateur du King. Quintessence de sa folie créatrice, expérimentation graphique perpétuelle, Le quatrième monde est une pierre angulaire des comics, malheureusement inachevée par son maître architecte et pionnier visionnaire.
Les avis
jr5902
Le 12/03/2015 à 10:08:08
Le "King" au sommet de son art! un album indispensable pour tous ceux qui ont vu leur enfance et adolescence transformée par l'arrivée des super héros en France.
JR