C
ôtes d’Armor, seconde moitié du XIXe siècle. Le lieutenant Julien Le Denmat, ancien combattant de la guerre de Crimée, est de retour dans sa région natale en qualité de chef des douanes. Depuis que les autorités ont assaini la côte, la contrebande a quasiment disparu. Malgré cela, en terre de légendes, il reste suffisamment de mystères et de secrets de famille pour occuper le jeune homme.
Comme pour Le gardien de feux, François Debois adapte une œuvre de l’écrivain Anatole Le Braz. Pour Quand souffle le vent des îles, le scénariste a choisi de construire son histoire en fusionnant deux textes du folkloriste breton. L’association de personnages forts à la psychologie complexe à une ambiance lourde est admirable. À l’image de Julien Le Denmat, présenté comme un jeune premier redresseur de torts, mais révélant rapidement une âme troublée, tous les protagonistes semblent naviguer entre deux eaux. Les petits secrets, plus ou moins avouables, s’accumulent et les ombres du passé ressurgissent. Et puis, la mer, le lien qui réunit tous ces destins, veille, réconforte tout en menaçant. À la barre, le scénariste garde le cap et réussit avec un certain brio à maintenir un très bon suspens. Un petit bémol néanmoins, les deux lignes narratrices issues des deux nouvelles originales, peinent, par moment, à se compléter. Pour retomber sur ses pieds, Debois est alors obligé d’utiliser plusieurs ellipses audacieuses. Sans être véritablement gênantes, elles se font remarquer à plusieurs occasions.
Le traitement réaliste de Serge Fino (Les ailes du Phaéton) agrémente parfaitement le récit. Le dessinateur, très bien assisté du studio Digikore pour les couleurs, arrive précisement à retranscrire l’atmosphère de la côte bretonne. Non, il ne pleut pas tout le temps, l’air marin est, au contraire, imprévisible. Acteurs obligés des récits maritimes, Fino a très bien su intégrer les éléments météorologiques à ses planches. Malgré des textes parfois un peu envahissants, la mise en page est aérée et inventive. La reconstitution historique (décors, costumes) est également très bien réalisée, le souci du détail ajoute une autre touche de réalisme au rendu général.
Malgré quelques petits défauts, Quand souffle le vent des îles est un album des plus prenants.
Sur le même sujet :
La chronique du Gardien de feux par L. Delompré
La chronique de L’étrangleur de Boston par Y. Tilleul
Le blog de Serge Fino
Le blog de François Debois
Les avis
Erik67
Le 05/09/2020 à 11:39:30
"Quand souffle les vents des îles" semble être une autre bd sur le thème des mystères de la Bretagne après Le Sang de la Sirène et Le Gardien du feu du même scénariste. C'est en tout cas une autre adaptation de l'oeuvre d'Anatole le Braz. Je n'ai rien contre les bd qui tournent autour de la Bretagne, une région riche en contes et légendes, mais force est de constater qu'il y a véritablement une exploitation commerciale à tout va.
Alors que j'avais bien aimé les 2 oeuvres citées ci-dessus, ce one shot m'a moins convaincu. Cependant, le travail reste tout à fait honnête et de bonne qualité. J'ai eu l'impression de ne pas avancer dans l'histoire à cause de la quantité de dialogues pourtant indispensable à la compréhension du récit qui tourne autour de la fraude maritime. Le dessin offre de belles perspectives notamment sur la puissance de la mer et sur la beauté des ces îles. C'est un régal pour les yeux.
Le titre a quelque chose de poétique alors que le récit ne l'est pas. Même l'histoire d'amour n'est pas très prenante. Cela manque de saveur. Pour autant, c'est tout de même une adaptation intéressante mêlant contrebande, intrigue et romance dans une ambiance angoissante sur fond de superstitions.
En conclusion, le lecteur passera un moment agréable mais il manque le petit plus pour faire de cette oeuvre quelque chose de réellement inoubliable.