Info édition : Un cahier de 8 pages à la fin de l'album sur les recherches et les recherches graphiques. Noté "Première édition" page 65.
Résumé: Parfois, il est des secrets qu'il vaut mieux taire.
1961 - Joseph revient d'Algérie. Pour les habitants du village, il n'est qu'un planqué qui officiait dans un bureau plutôt que sur les zones de combat, un lâche qui a esquivé les durs travaux de la ferme. Personne ne lui pardonne d'avoir abandonné sa famille, alors que son frère est cloué sur une chaise roulante, victime d'un accident de tracteur pendant son absence. D'enfant du pays, Joseph revient en paria. Heureusement, l'honneur du village est sauf : le fils du cafetier, lui, s'est battu en Algérie. Mais quand il revient à son tour de la guerre et révèle aux habitants le secret de Joseph, l'invraisemblable vérité éclate au grand jour.
I
l est revenu. Si le cœur de la mère - comme celui de toute mère - se gonfle de joie à la vue du fils, le regard du père s'en détourne. 1961, Joseph revient au pays, la guerre d'Algérie est terminée. Jules, le frère, lui réserve également un accueil des plus cyniques. Pourquoi ces réactions aussi froides ? Il parait que le jeune soldat aurait passé le temps du conflit à l'arrière, un planqué quoi. Y a pas d'honneur ni de gloire dans ces conditions. Peut-être que la vérité est plus complexe que cela. Et Mathilde, l'a t-elle attendu ?
Artiste de plus en plus présent, Philippe Pelaez aime s'attaquer à des genres très différents dans ses séries. Après la S-F de Parallèle, il dépoussière le fantastico-gothique avec Maudit sois-tu ou dynamise le policier humoristique dans Un peu de tarte aux épinards. Il propose ici un one-shot dont le fond s'inscrit dans le difficile contexte de l'histoire militaire française. Les thématiques abordées sont nombreuses, classiques et universelles : le retour à la vie parmi les civils, le regard des autres, le poids des actes, la culpabilité, l'exacerbation des sentiments... À travers cet événement précis, le scénariste évoque finalement les conséquences de tout conflit armé, le propos dépassant le cadre propre à cette confrontation marquante pour élargir la réflexion. Chaque personnages représente l'archétype d'un comportement attendu. Ce petit manque de subtilité engendre un suspense moindre une fois le secret de Joseph dévoilé. Néanmoins, le plaisir est au rendez vous avec ce drame solide et immersif.
Victor L. Pinel (La maison de la plage) propose un graphisme semi-réaliste aux couleurs satinées, très sage. Son trait propre et net génère beaucoup de clarté dans les illustrations et aucune fioriture. Le lecteur peut le voir de deux façons : apprécier le fait d'adoucir le propos de teneur tragique ou regretter l'absence de noirceur inhérente au sujet. Quoi qu'il en soit, la lecture se révèle relativement plaisante et fluide.
Sur un scénario sobre et sérieux, les deux artistes livrent avec Puisqu'il faut des hommes un récit poignant qui, s'il n'apporte pas de regard neuf sur la question, en offre une version qualitative et passionnante.
La preview
Les avis
EmpereurMato
Le 11/02/2021 à 13:17:11
Pamphlet sur la guerre d’après, celle qui ronge les âmes. Quand le retour salvateur ne rime qu’avec douleur, le sens de la vie devient bien abstrait. Classique dans son développement mais pas consensuel dans l’idée développée lors de l’épilogue. Grand angle nous offre une nouvelle fois un excellent dossier de fin d’ouvrage pour approfondir le sujet et nourrir notre réflexion.
Erik67
Le 02/02/2021 à 08:10:05
Enfin un titre qui reconnaît la place de l'homme dans la société dans le genre du film « Tant qu'il y aura des hommes ». Certes, mais c'est pour faire la guerre et notamment celle d'Algérie ce qui n'est pas très louable.
Plus généralement, le thème concerne les soldats qui rentrent au bercail. Leur retour ne sera pas si facile que cela en raison des traumatismes subies par la guerre.
Cependant, notre héros Joseph qui revient d'Algérie est considéré comme un véritable planqué alors qu'il y a eu déjà plusieurs morts pour la France dans le village. Les paysans ne lui pardonneront pas en exprimant toute leur haine. Pour autant, la vérité sera un peu plus complexe que cela sans vouloir dévoiler l'intrigue.
J'ai aimé aussi bien le graphisme fluide et réaliste que ce scénario réellement bien maîtrisé qui réserve de sacrée surprise notamment dans son final. On peut comprendre qu'il y a des secrets qu'il vaut mieux taire. Les certitudes ne sont jamais des faits acquis. A méditer !
Commissaire_Juve
Le 10/02/2020 à 11:21:23
Bonne surprise. BD à la fois intelligente et simple. Ne tombe pas dans les clichés sur la guerre d'Algérie en se tenant en fait à distance (Il faut néanmoins rappeler que la guerre d'Algérie est une victoire militaire francaise incontestable, le ratio de 3 morts sur 5 dans le village et l'annonce d'une défaite francaise à venir ne sont pas corrects). Dans mon village en Bretagne les jeunes agriculteurs ont tous acheté des tracteurs quand ils sont revenus de leur service en Algérie, sympa de revivre ce grand bouleversemment dans une BD.
gregory3
Le 19/01/2020 à 02:37:24
Quand mon libraire me la conseillé je n'étais pas fan du dessin et puis j'ai commencé à lire l'album et je ne l'ai plus lâché jusqu'à la fin.
Radamour
Le 08/01/2020 à 12:22:18
Beau trait, couleurs cohérentes avec les différents univers et récit bien mené sur un sujet, la guerre d'Algérie, qui est bien loin d'avoir révélé tous ses traumatismes et ses secrets. Je ne suis pas toujours fan des éditions Bamboo à l'exception de la collection Grand angle qui me confirme sa qualité avec ce tome.