Résumé: Hedy Lamarr est jeune, intelligente, talentueuse, belle. Si belle, que cela lui a valu le surnom de « plus belle femme du monde ».
Quand se réalise son rêve de devenir actrice, elle se retrouve embarquée dans une vie qu’elle n’imaginait pas.
Après avoir fuit l’Autriche nazie et un premier mari marchand d’armes, elle se retrouve à Hollywood.
Dans le milieu des années 40, l’industrie du cinéma est dirigée exclusivement par des hommes. Alors quand on est jeune actrice comme Hedy Lamarr, incroyablement séduisante et aimant les hommes (6 maris et de nombreux amants célèbres), difficile d’exister pour autre chose que sa beauté.
Mais Hedy n’est pas juste belle, elle est aussi curieuse, intelligente, et adore imaginer des inventions, sérieuses ou farfelues. En collaboration avec le compositeur et écrivain George Antheil, elle met ainsi au point un système de communication cryptée, qui sera plus tard utilisé pour le guidage des missiles mais aussi pour le WIFI.
Un destin exceptionnel pour une femme hors norme. Et si être belle n’était finalement pas un atout ?
L
a MGM fit d’elle la plus belle du monde ! La légende veut qu’elle inspirât Disney pour sa Blanche Neige et que la première Catwoman lui doive beaucoup. Morte à 85 ans dans une quasi-indifférence sans vraiment avoir marqué le 7ème Art, la technologie des communications ne serait cependant pas ce qu’elle est aujourd’hui sans elle ! Elle, c’est Hedy Lamarr.
Née en Autriche en 1914, mais ukrainienne par son père et roumaine par sa mère, Hedwig Eva Maria Kiesler défraya la chronique cinématographique européenne avec Extase où elle mima le premier orgasme féminin du cinéma, elle n’avait pas encore 20 ans. Fuyant la montée du nazisme, elle émigra aux États-Unis où Louis B. Mayer essaya d’en faire l’égale de Garbo... sans réellement y parvenir ! Trop souvent réduite au rang de trophée, tous oublièrent qu’elle fut, avec le compositeur George Antheil, la co-inventrice de l’étalement de spectre par saut de fréquence qui est toujours utilisé pour le positionnement par satellites ou certains types de Wi-Fi !
Sous ses airs de biographie, cet album s’avère très contemporain. Au travers de ce destin hors-norme, chacun pourra s’interroger sur la valeur de la beauté, le star system ou bien encore le formatage social qui empêche l'Humanité de valoriser pleinement la moitié de son potentiel. Femme indépendante et magnifique, autodidacte certainement plus intelligente que la plupart des hommes qu’elle côtoya, femme à hommes à la libido pathologique, mère discrète au point de cacher sa carrière à ses enfants, Hedy Lamarr s’avéra être une personne complexe et William Roy sait, dans un récit linéaire, rendre compte de son ambiguïté sans pour autant expliquer les contradictions de celle qui interpréta la Delilah de Cecil B. DeMille.
Pour donner vie à cette innovatrice dilettante, Sylvain Dorange utilise une mise en page sur trois strips souvent en deux cases gardant ainsi une classique constance que viennent rompre quelques pleines pages. Simple et fin, le trait souligne les yeux, dessine les nez et laisse aux aplats de couleurs le soins d’animer des planches qui jouent avec les codes visuels de l’âge d’or d'Hollywood.
Hedy Lamarr assuma sa double personnalité, mais elle eut visiblement le tort d’être née trente ans trop tôt. La plus belle femme du monde possède le mérite de la (re)mettre à l’honneur, comme ce fut aussi le cas, il y a peu, pour un certain Alan Mathison Turing.
La preview
Les avis
Erik67
Le 28/08/2020 à 23:25:04
J'ai bien aimé l'histoire de la plus belle femme du monde. On se rend compte qu'être très belle n'a pas que des avantages bien au contraire. On peut certes avoir la gloire d'une starlette à Hollywoodland.
Cependant, le regard des gens ne changera pas. On est cantonné dans un rôle même si on est la géniale co-inventrice d'un procédé technologique utilisé encore aujourd'hui dans les systèmes de communication et du wifi.
Bref, l'intelligence peut se cacher derrière une actrice sensuelle. Qui sait si on découvrira un jour que Marilyn Monroe ou encore Loana étaient de géniales inventrices ? Tout est possible en ce monde.
Ceci dit, c'est une belle biographie assez passionnante à l'image d'une vie avec plusieurs époux dont un proche du pouvoir nazi. C'est un destin romanesque qui est joliment mise en image. Une lecture qui n'a pas du tout été ennuyeuse.
bd.otaku
Le 21/01/2019 à 08:42:40
Pénélope Bagieu avait déjà consacré un de ses portraits de « Culottées (2) » à Hedy Lamarr actrice et inventrice née en 1914 et morte en janvier 2000 mais il était extrêmement condensé. Dans ce biopic de 176p, William Roy et Sylvain Dorange développent donc le destin de cette personnalité au parcours incroyable, féministe avant l’heure et incomprise de ses contemporains qui ne voyaient en elle que « la plus belle femme du monde » et refusaient d’admettre qu’on pouvait être magnifique et scientifique à la fois !
Le scénariste qui a travaillé cinq ans sur cet ouvrage lui rend donc longuement justice et la réhabilite tout en évitant l’écueil d’un biopic linéaire. Il emploie au contraire une narration dynamique et polyphonique : l’ouvrage commence en 1957 avec des « images d’archives » d’un show télévisé et s’achève pratiquement sur le même genre de show douze ans plus tard qui enferment donc l’héroïne dans son image de fantasme masculin tout comme la très drôle mise en abyme de 1977 (un guide spécialisé dans les tours de maisons de célébrités à Hollywood prend en charge une partie de la narration et raconte de façon racoleuse la vie d’Hedy Lamarr à l’aide d’anecdotes croustillantes) mais, fort heureusement, le finale de l’album et le reste de la narration permettent de redonner à cette personnalité toute son épaisseur et sa complexité !
Les dessins de Sylvain Dorange participent à ce plaidoyer et suscitent également tout l’intérêt du lecteur : le dessinateur adopte pour chaque période un style graphique particulier ( jusque dans les polices), rend bien les changement vestimentaires des différentes époques qu’il et fait revivre grâce aux décors soignés et un travail extrêmement documenté en incluant même des images d’archives ( posters, shows, affiches de cinéma ou de propagande, extraits de films). Il arrive également fort bien à créer différentes ambiances (angoissante pour la montée du nazisme, « pailletée » pour les années hollywoodiennes…) pour accompagner le parcours de cette femme qui a traversé le siècle et qui était trop moderne pour ses contemporains. Une belle réussite !