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uasiment vingt ans après la disparition de (A SUIVRE), Casterman propose une nouvelle revue de bande dessinée, Pandora. Depuis le changement de millénaire et l'avènement d'Internet, des blogs et des réseaux sociaux, les modes de consommations culturelles se sont largement modifiés. L'équipe dirigée par Benoît Mouchard en a logiquement tenu compte : exit les longues histoires en épisodes comme tout contenu éditorial et adios toute volonté thématique. En 2016, pour réussir, il faut du court, car à l'ère de Twitter les esprits papillonnent plus qu'ils ne creusent les sujets, il faut balayer large pour capter un marché fragmenté à l'infini et présenter des têtes d'affiche et de l'inédit pour que l'acheteur soit persuadé qu'il en a pour son argent.
Pandora réussit la prouesse de combler tous ces desiderata sous la forme d'un épais numéro semestriel. Deux cents soixante pages de nouvelles signées, en majorité, par des auteurs maison reconnus ainsi que par quelques artistes « invités » bien en vue. Science-fiction, autobiographie, sociale, historique, allégorique, fantastique, aucun genre n'est oublié ! Pas de doute, beaucoup de talents s'expriment, certains étonnent et séduisent, d'autres moins. L'ouverture à l'internationale est également opportune, même si des continents entiers sont encore absents.
Cette nouvelle publication est évidemment la bienvenue dans un paysage où les magazines BD sont devenus rares ou éphémères. Par contre, à la lecture, l'absence de ligne éditoriale claire ou de réelles prises de risques artistiques (où sont les débutants ?), ces pages donnent plus l'impression de composer un florilège ou un « showcase » qu'un véritable projet de presse. Si, dans son éditorial, Mouchard souligne qu'il ne suffit pas d'agencer des dessins sur une page pour créer une bande dessinée, l'observation vaut également pour son journal : on ne forge pas une identité uniquement avec une succession de récits n'ayant aucun point commun, ni près ni de loin.