Info édition : Avec une préface de Gernot Rohr. + Dossier en fin d'ouvrage
Résumé: Né à Mannheim en 1912, le jeune Oskar Rohr se passionne pour un sport alors encore jeune : le football.
Prodige du ballon rond, celui que l'on surnommera « Ossi » intègre à 18 ans le FC Bayern Munich. Sa carrière est rapidement bouleversée par la montée du nazisme : il fuit son pays pour la France où il rejoint l'équipe du RC Strasbourg.
Dès lors, il est considéré comme un traître par le IIIe Reich qui ne manquera pas de le rappeler à son devoir de citoyen allemand et lui fera porter de force l'uniforme...
Ossi rend hommage à l'un des joueurs de football le plus talentueux de sa génération, aujourd'hui injustement oublié.
Préface de Gernot Rohr, ancien footballeur et entraîneur (Girondins de Bordeaux), conseiller technique de la Fédération du Nigeria (NFF) et petit-neveu de Ossi.
P
our la majorité du public, le nom d'Oskar « Ossi » Rhor (1912 – 1988) n'évoquera pas grand-chose. Par contre, chez les férus de l’histoire du football ou les spécialistes du RC Strasbourg, ce patronyme est synonyme d’un des plus grands attaquants d’avant-guerre. Extraordinaire joueur et buteur, Ossi est un pionnier de la Bundesliga (il a participé à la conquête du premier titre du Bayern de Munich) et des débuts du professionalisme en général. Exilé volontaire après la prise du pouvoir par les Nazis qui considéraient le ballon rond comme un sport étranger à bannir, il joua également en Suisse et en France. Rattrapé par les événements, il fût enrôlé de force dans la Wermacht et envoyé sur le front russe. Sorti indemne du conflit, il joua encore quelques années avant de prendre sa retraite des terrains et sombrer dans l’anonymat.
Biopic suivant les règles de l’art, Ossi retrace la première moitié de la vie de cet athlète largement oublié aujourd’hui. Dès sa plus jeune enfance, Oskar ne rêve que de football et rien d’autre. Repéré par les entraîneurs, il est rapidement recruté et entame une carrière fructueuse qui le mènera jusqu'en équipe nationale (quatre sélections, cinq buts). Puis, l’histoire avec un grand H vient mettre fin à ses ambitions. Certes, « transféré » à Zurich, Strasbourg et Sète, il réussira à s’imposer et gagnera des trophées, mais, globalement, il n’aura jamais pu exprimer tout son potentiel. Des millions de victimes n’ont pas eu la chance de sortir vivants de ces années noires, néanmoins, à sa manière et à son niveau, sa trajectoire permet de raconter un pan rarement visité de la société de l’époque.
Parfaitement documenté, Julian Voloj dresse un portrait très convaincant du microcosme sportif allemand et des conséquences peu connues du nazisme sur le championnat allemand. Il est soutenu dans sa tâche par l’approche très expressionniste de Marcin Podolec. Résultat, le mélange entre une chronologique méticuleuse et un style graphique relâché procure à l’album une atmosphère patinée sans être vieillotte. La surprenante mise en couleurs façon « crayons de coloriage » renforce encore ce côté suranné de la narration.
À la fois évocation d’un passé déjà lointain et récit poignant d’un homme qui croyait en son talent plus qu’à toutes autres considérations, Ossi est une lecture intéressante qui devrait rallier les hourras de tous les amateurs de beau jeu.
Les avis
Erik67
Le 27/08/2020 à 20:03:45
Voici une bd sur le football un peu particulière car elle nous décrit ce sport durant la période de l’Allemagne nazie. On apprend que cette discipline est née en Grande-Bretagne et qu’elle a été exportée sur le continent par un Allemand convaincu. Il a pris un essor au début du XXème siècle par la création de nombreux clubs dont le célèbre Bayern de Munich.
C’est surtout un récit concentré sur un joueur d’exception de cette époque qui a vu sa carrière totalement chamboulée par la guerre. Ossi (de son vrai nom Oskar Rohr) était l’un des plus talentueux et son nom est malheureusement tombé dans l’oubli. Cette œuvre est là pour réparer un préjudice de mémoire.
Ce dernier ne s’intéressait guère à la politique. Il était célèbre pour avoir remporté avec son équipe le Bayern de Munich le championnat allemand en 1932.
Avec l’accession d’Hitler au pouvoir en 1933, cela change toutes les données. On ne peut pas dire qu’Ossi était un sympathisant aryen, loin de là. Il va marquer ses distances au point de quitter l’Allemagne en 1934. Il faut dire que le régime nazi privilégie d’autres disciplines comme par exemple l’athlétisme et que le football est considéré comme une importation étrangère malsaine. Il fut alors considéré comme un traitre à la patrie. Un comble.
Il a rejoint notamment la ville de Strasbourg au point de l’aimer passionnément. Il se déclarait même Strasbourgeois avant d’être Allemand ou Français. Il avait d’ailleurs fait progresser considérablement le Racing Club de la ville en le menant à la finale en 1937 qui fut malheureusement perdue. Sur 136 matches, on observe 118 buts en championnat.
Cet international allemand s'était engagé dans la légion étrangère en 1939 pour combattre les Nazis en 1939-40. Il a été fait prisonnier par les Allemands qui l'enferment dans un camp de concentration près de Karlsruhe, puis l'expédient sur le terrible front russe. Fort heureusement, il en réchappera de façon assez miraculeuse que je ne dévoilerai pas (voir dans la bd). Il jouera encore en Allemagne jusqu’en 1949 avec beaucoup moins de succès. Par la suite, il mettra un terme à sa carrière.
Cette bd me rappelle cette histoire des coureurs sur le tour de France durant la période de la Première Guerre Mondiale où la plupart sont malheureusement tombés. Cela rappelle que les guerres peuvent briser notamment des carrières sportives en plus d’entraîner mort et désolation. Ce joueur en d’autres circonstances c’est-à-dire de paix aurait certainement connu une consécration et une reconnaissance mondiales à l’image des plus grands footballeurs de notre temps.
Pour ma part, j’ai bien aimé le contenu et la forme m’a paru assez satisfaisante. C’est basé spécifiquement sur le football dans sa première partie et sur des aspects plus contextuels et politiques dans sa seconde partie. Je ne suis pourtant pas un fan de foot mais j’accorde 4 étoiles pour les qualités de cette œuvre sans gros reproches.