Résumé: 1946, au coeur des Ardennes. Une femme atteinte d'une maladie incurable, Marie-Louise Marchandise demande à deux de ses fils, André et René, de retrouver l'aîné de la fratrie, Charles, disparu dans la tourmente de la guerre. Une demande pressante, mais source de vives tensions : l'engagement de Charles dans la L.V.F., une organisation alliée des nazis, n'a pas laissé de bons souvenirs à André, qui lui a combattu dans la Résistance.
Pourtant, par dévouement pour sa mère, il accepte de partir en quête de Charles. Au fil de ses recherches dans une Europe dévastée, André va découvrir l'existence d'O.D.E.SS.A., le réseau qui organise la fuite des criminels de guerre nazis vers l'Amérique du Sud.
M
arie-Louise Marchandise le sent bien, sa fin est proche. La vieille dame a néanmoins un ultime souhait : partir entourée de ses trois fils, André, René et Charles. Le problème est que celui-ci est porté disparu depuis la fin de la guerre. De plus, durant le conflit, il s'était engagé dans la Légion Charlemagne au côté des nazis ! Pour André, résistant de la première heure, la situation est claire, ce frère a trahi et il n'a plus sa place dans la famille. Le dernier vœu d'une mourante étant sacré, il s'engage toutefois sur la piste du traître et va découvrir un monde interlope qui n'aime pas les questions.
Un sujet intéressant, très bien documenté, de l'action et des rebondissements, tous les éléments sont présents pour rendre O.D.E.SS.A. passionnant. Grosse déception au final, la lecture de ce diptyque – les deux albums sortent en même temps – se révèle consternante tant la narration est répétitive et d'une grande lourdeur. À force de privilégier la véracité historique, Michel Dufranne (La Bible, Triangle rose) se perd dans des explications verbeuses. Résultat, les personnages, particulièrement André qui subit passages à tabac et autres séquences de torture tout au long du récit, se résument à de simples coquilles vides ou à des caricatures (la prostituée au grand cœur, les caïds à l'argot mal ajusté et les flics plus ou moins ripoux) subissant passivement les événements page après page. Pire encore, l'accumulation de non-dits et autres petits secrets, les tenants et les aboutissants de l'histoire finissent par devenir incompréhensibles.
Aux pinceaux, le travail de Peka peine à rehausser le scénario. Le trait est dur, figé et sans élégance. Les nombreux protagonistes se ressemblent et sont parfois difficiles à discerner. Heureusement, la mise en scène bien en place offre un peu de répit au lecteur. Pas pour longtemps cependant, la mise en couleurs très radicale de Christian Lerolle, même si elle évite le traditionnel sépia trop souvent associé aux années quarante, favorise les demi-tons et une grisaille systématique. En conséquence, les planches baignent dans une atmosphère pesante et déprimante.
Confus et peu esthétique, O.D.E.SS.A. s'apparente à un naufrage complet malgré un propos historique intrigant.
Les avis
Erik67
Le 22/11/2020 à 13:10:29
O.D.E.SS.A part d’un constat assez séduisant que celui de retracer les parcours différents de 3 frères pendant la Seconde Guerre Mondiale. L’un sera un rescapé de guerre, l’autre entrera dans la résistance, quant au troisième il aura collaboré avec l’ennemi nazi. Cependant, les auteurs vont s’intéresser surtout au dernier tout en l’opposant au résistant d’obédience communiste.
On va découvrir alors que la réalité est parfois un peu différente de ce que l’on pense surtout dans un tel contexte. Il est dommage de suivre un jeune blanc-bec détestable jusque dans ses attitudes stéréotypées. Il semblerait que cela ait été voulu par l’auteur pour décrire la vraie tête à claque qui croit tout savoir.
Par ailleurs, le scénario introduit des scènes de flash-back qui ne semblent pas suivre une certaine linéarité ce qui rend la compréhension plus délicate. Bref, la construction et la mise en scène comportent de sérieuses lacunes. Le style est un peu rugueux mais pas désagréable.
Pour autant, c’est un récit qui se lit bien et qui donne envie de poursuivre d'autant que le second tome de ce diptyque a été immédiatement disponible. Par conséquent, je serai indulgent dans ma notation. A noter que l’action se déroule dans les Ardennes, puis en Belgique avant de découvrir la fameuse filière d’évasion des nazis dans le second tome qui sera à peine évoqué (à mettre en parallèle avec le titre de l’album !).