Résumé: Au Smithsonian Institute, on n'a plus aucune nouvelle de l'expédition scientifique partie dans les Monts Ozarks, sur les traces d'une race de géants qui aurait existé en Amérique du Nord. Et l'armée a d'autres sudistes à fouetter, car la guerre de sécession fait rage... Seul à présent, Kennicott décide de se rendre sur place pour retrouver ses amis et collègues. Il ignore que ces derniers sont coincés au beau milieu d'une poudrière où les humains se déchirent au gré d'alliances de fortune. Entre régiment Confédéré, troupe afro-américaine nordistes et Amérindiens, la violence fait rage alors que les « grands anciens » entendent bien prendre part au conflit.
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ans nouvelles de ses amis, mandatés par le musée Smithsonian pour effectuer des recherches archéologiques aux monts Ozarks, Kennicott décide de s’y rendre. L’expédition est risquée, car en 1864, les montagnes sont le théâtre d’un affrontement entre le nord et du sud. Au centre de ces combats fratricides, les noirs sont tolérés par les uns et détestés par les autres. Chacun des camps a du reste forgé des alliances, plus ou moins stables, avec des tribus amérindiennes.
Le scénario, signé David Dusa et Sylvain Runberg, expose une guerre de Sécession passablement complexe, où tout n’est pas bleu ou gris. Au final, tout un chacun apparait brutal, insensible et oppressif. En ces temps troubles, même les autochtones possèdent des esclaves afro-américains. Le tandem évoque aussi les droits des femmes et ceux des homosexuels, rappelant du coup qu’à l’époque, toute l’organisation de la société est inégalitaire.
Comme si ce n’était pas suffisant, les auteurs ajoutent un autre belligérant : des géants tenant mordicus à défendre leur sanctuaire que les gens de sciences tentent de piller au nom de la connaissance. Cet ajout d’une intrigue fantastique semble superflu, tant le canevas est déjà riche.
Stéphane de Créty illustre le projet d’un trait réaliste aux accents expressionnistes. Ses personnages, souvent captés en gros plan, se veulent expressifs, parfois un peu trop ; ils ont également l’étrange manie de tous loucher. Les hostilités sont habilement dépeintes ; le lecteur ressent la violence, la peur, voire la douleur des protagonistes. La représentation de la nature dans tout ce qu’elle a de plus sauvage est très réussie, elle exprime l’isolement, là où tout peut arriver. L’artiste opte pour une colorisation sombre, laquelle accentue l’oppression conditionnée par les lieux et exacerbe l’angoisse.
Une entreprise ambitieuse, où s’entremêlent plusieurs trames disparates. Reste à voir comment, dans le troisième et dernier tome, les bédéistes les feront toutes converger pour conclure le triptyque.