Résumé: Qu'un petit garçon essaie d'embrasser une petite fille, cela n'a normalement rien de dramatique. Et que la petite fille se dérobe et envoie balader son petit camarade, c'est suffisamment banal pour rester un épisode parmi tant d'autres dans les chroniques d'une enfance ordinaire. Mais si la scène se passe pendant la projection d'un film de propagande, à l'école, dans une République socialiste, bien des années avant que le Mur ne fasse mine de se fissurer, tous les ingrédients sont réunis pour que cela vire au drame... C'est ce que racontent Marzena Sowa et Sandrine Revel au fil de ce roman graphique humain et sensible.
À travers l'histoire de ces deux enfants, c'est le mode de fonctionnement d'une société rongée par la paranoïa et l'obsession du contrôle qui est passé au crible. Une société où tous les gestes, même les plus infimes et les plus innocents de la vie quotidienne, peuvent vous plonger dans les pires ennuis, dès lors que la chaîne fatale de la surveillance, de la dénonciation et du chantage se met en marche. Le récit est complété de pages documentaires sur les repérages de Sandrine Revel et Marzena Sowa en Pologne.
Après Marzi, Marzena Sowa signe son premier récit non autobiographique, auquel Sandrine Revel apporte une extraordinaire sensibilité graphique, puisant aux sources de Winsor Mc Cay, comme chez Sylvain Savoia. On retrouve dans N'embrassez pas qui vous voulez cette acuité du regard et cette justesse d'observation qui ont valu à Marzi le succès que l'on sait.
L'idée était de démontrer comment cela se passait dans la dictature stalinienne où pour un rien, on pouvait perdre la vie. Cela met en scène des enfants ce qui souligne le caractère dramatique d'une telle société qui prive de la liberté de penser. J'ai beaucoup aimé le début de cette oeuvre et un peu moins la dernière partie où il ne se passe finalement pas grand chose comme un pétard prêt à exploser mais qui s'éteint.
On se dit bien que la vie n'était pas rose sous la dictature soviétique qui s'imposait au bloc de l'Est. On se plaint souvent de la situation actuelle (vivre sous une dictature socialiste...). Mais on oublie petit à petit qu'il y a eu bien pire dans l'histoire et que ce n'est pas comparable. Et c'est justement parce qu'on a le droit de dire ce qu'on pense du gouvernement, qu'on vit dans une réelle démocratie avec le pouvoir de passer de la droite à la gauche et vice versa quand on n'est pas content comme si cela changeait les choses...
N'embrassez pas qui vous voulez reste un témoignage poignant d'une certaine époque et qui peut remettre les idées en place. Je pense que cela serait bien nécessaire par moment.
Lartenbulles
Le 29/08/2012 à 17:56:56
Les dérives et les paradoxes de la vie dans un état totalitaire. Les auteurs traitent de la liberté de penser avec beaucoup de finesse et mettent en avant le mal-être de chacun avec beaucoup d'intelligence.
Dommage que l'impression soit si sombre et rende si peu honneur au dessin de Sandrine Revel.