L
ondres, 1875. Quelques jours après ses noces, la jeune Valeria découvre que son mari lui a caché son vrai nom. Mais avec quel genre d'individu s'est-elle mariée? Un temps abasourdie, elle décide de mener son enquête ne se laissant pas décourager par un environnement plutôt hostile.
Après la réussite indéniable de Fog il y a quelques années, Roger Seiter choisit à nouveau l’Angleterre victorienne pour décor de sa nouvelle série. Il faut dire que, récemment, la contemporaine et surnaturelle Dies Irae n’avait pas franchement convaincu. Là, on se trouve en terrain connu et dans un registre familier et balisé, celui de l’enquête policière conduite par un détective en herbe qui se trouve être victime d'un imbroglio. Le rythme est lent, le parcours et les états d’âme de l’héroïne soigneusement détaillés. Au point même d’avoir envie dans la première partie de l’album de la chahuter un peu et de la voir sortir la tête de l’eau pour qu’on entre dans le vif du sujet. Si tout n’est pas évident dans ce mystère et dans son issue – c’est heureux-, le style est très littéraire et grandement démonstratif pour ne pas dire bavard. Mais il convient de ne pas oublier que Seule contre la loi est à l’origine un roman de Wilkie Collins, considéré par certains comme l’un des fondateurs du genre « polar » (malicieusement, Seiter lui offre même d’endosser un second rôle dans son adaptation). Chez ce contemporain de Dickens (avec lequel il a un temps collaboré), on n’hésite pas à donner dans la description et le détail, question de courant sinon de mode de l’époque. Et de ce point de vue, le premier tome de Mysteries semble miser sur une certaine fidélité à l’original.
Pourtant, l’ennui n’est pas au rendez-vous. Il est facile de rester attentif entre deux mouvements d’humeur : la naïveté originelle de Valéria agace, ses recherches chez Fitz-David paraissent interminables, mais la façon dont les « portes » de l’énigme s’ouvrent et les masques tombent suffit pour avoir envie de poursuivre l’enquête. Tout comme la découverte de cette particularité de la justice écossaise qui offre un ressort intéressant à tout scénariste. Le charme des affaires judiciaires non tranchées aux accents probables de machination opère. C’est sans doute ce qu’il fallait pour passer outre un trait plutôt morne et statique. Certaines applications de trames sur des vêtements ou des décors ne sont pas non plus du meilleur effet. N’est pas Cyril Bonin qui veut pour magnifier cette époque et faire d’un style personnel une évidence pour la représenter.
Pour reprendre un vocable courant dans les prétoires anglo-saxons, il convient d’accorder plus que le « doute raisonnable » pour juger ce premier volet. La tendance est à la clémence donc. Verdict définitif avec la conclusion de ce diptyque.