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uteur au talent hors norme, Guillaume Bouzard construit sa carrière autour d'un point central, un objectif unique, une mission divine selon certain. En effet, qu'il s'aventure – avec l'aisance du renard des surfaces de réparation dans le geste – dans l'autobiographie (The autobiography of me too free), l'heroic-fantasy à saveur régionale (Mum is dead), le commentaire sportif (Football-Football) ou même le stupre (La bibite à bon Dieu), la franche rigolade (l'humour disent les spécialistes) est toujours de mise. Seul à sa table à dessin, l'artiste, tel un saint à auréole, réalise modestement le propre de l'homme.
Recueil d'histoires parues dans Fluide Glacial, Moi, Bouzard se situe dans la lignée des trois tomes d'Autobiography of me. Des récits pseudo-autobiographiques dans lesquels le scénariste passe en revue quelques épisodes de sa riche existence : petits boulots de jeunesse, la fierté du premier album et les tracasseries d'aujourd'hui (la retraite, la santé). Les sujets sont variés, s'enchaînent sans trop de logique interne et sont immanquablement racontées avec le meilleur esprit (c'est rigolo, voir plus haut, la quête mystique). L'ouvrage manque cependant de structure. Les anecdotes se suivent, mais ne se complètent pas et, pire, se marchent dessus avec des situations qui se répètent (les retards, l'angoisse de la page blanche, la vie de la rédaction). Le résultat est néanmoins plus qu'honorable et immanquablement très drôle. De plus, le style du dessinateur est arrivé à maturité et est parfaitement en place. Par contre, l'étincelle de folie qui met le feu aux poudres des zygomatiques et dilate la rate se fait un peu rare au fil des planches. Que les amateurs ne boudent pas leur plaisir, Moi, Bouzard est toutefois un opus sympathique et hilarant.