Résumé: Charity est une petite fille débordante de curiosité, assoiffée de contacts humains, de paroles et d'échanges,elle est impatiente de créer et de participer à la vie du monde. Mais voilà, une petite fille de la bonne société anglaise des années 1880 doit se taire et ne pas se faire remarquer ou à l'église, à la rigueur. Les adultes qui l'entourent ne font pas attention à elle, ses petites soeurs sont mortes. Charity se réfugie alors au troisième étage de sa maison en compagnie de Tabitha, sa bonne. Pour ne pas mourir d'ennui, ou sombrer dans la folie, elle élève des souris dans la nursery, dresse un lapin, étudie des champignons au microscope, apprend Shakespeare par coeur et dessine inlassablement des animaux qui conduiront Miss Charity vers son destin, tout d'abord naturaliste, puis, illustratrice de livres pour enfants mondialement connue.
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n dimanche comme un autre pour les Tiddler, en 1875. Alors qu'elle assiste à l'office religieux - obligatoire pour toute personne de bonne situation à Londres -, Charity ferme les yeux et rêve que le prophète Ézéchiel s'adresse à elle. Cette discussion tellement plus passionnante que le sermon du curé sera malheureusement interrompue par sa chute de la chaise. Quelle honte ! Que voulez-vous ? À cinq ans, cette enfant préfère élever des animaux dans sa chambre et recueillir d'étranges bestioles pour éviter l'ennui et tromper sa solitude.
Loïc Clément adapte ici une œuvre de Marie-Aude Murail, auteure spécialisée dans la jeunesse. Un peu Sophie de la Comtesse de Ségur, un peu Fifi Brindacier, un peu Calpurnia, la petite fille timide se révèle une héroïne adorable, vraiment très attachante. N'ayant ni frère ni sœur, un père mutique et une mère obsédée de l'étiquette, elle se débrouille comme elle peut pour apprendre la vie par elle-même en observant la nature et les gens autour. Dans ce premier tome (trilogie), le lecteur suit ses péripéties jusqu'à ses quinze ans. Et il s'en passe des choses l'air de rien ! Drôle, intelligent, simple et passionnant, le récit est parfaitement rythmé et ne donne qu'une envie, connaitre la suite ! La galerie des seconds rôles n'est pas en reste avec la fantasque Tabitha (la domestique), ou encore Mademoiselle Legros, une Française romantique éperdue.
Anne Montel participe grandement au charme de la lecture. Son trait fin, presque fragile mais débordant de vivacité rappelle la minutie de Béatrix Potter dont la romancière s'est inspirée. Les aquarelles délicates fourmillent de détails, achevant ainsi de conquérir l'adhésion des yeux. Les cases sont libres de tout contour, excellente manière de laisser respirer les illustrations.
Débordante de fraîcheur et de délicatesse, cette mise en images des aventures d'une fillette solitaire qui se fait sa place tant bien que mal dans une société victorienne étriquée est indéniablement une réussite.