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epuis Palaces et sa suite involontaire, Bureau des Prolongations, tout le monde sait que Simon Hureau est un voyageur, pas un touriste. Plutôt que de faire confiance aux guides, il laisse son instinct et le hasard mener ses pas. Ça va moins vite, mais ça permet de ne rien manquer. De retour chez lui, hormis quelques insectes séchés, il ne ramène de ses expéditions que des notes et de nombreux croquis qui, une fois dessinés, lui feront office de souvenirs et seront pour le lecteur autant d'invitations à la découverte. Mille parages, fragments bourlingatoires d'ici et d'ailleurs regroupe une partie de ces récits originellement parus dans différentes revues entre 2000 et 2014.
Qu'il crapahute en France, en Europe, en Afrique ou en Asie, Hureau conserve la même capacité d'émerveillement. Un arbre aux formes étranges, un phasme géant ou un tapis de chanterelles suffisent à son bonheur. Et s'il y a une belle rencontre à la clef, c'est encore mieux ! Les observations de l'auteur, qu'elles soient humaines ou naturalistes, sont à la fois respectueuses - il n'est qu'un humble visiteur de passage - et immanquablement admiratives. Qu'il s'agisse d'un monument majestueux, d'un simple étale de rue ou d'une grange délabrée qui sert d'abris pour une nuit, la planète est simplement belle, si on sait bien la regarder.
Voyager à la « dure » rime parfois avec galères (administratives, intestinales, etc.). Évidemment, sur le moment, ce n'est jamais très drôle (quoique...), mais, une fois que l'artiste se retrouve à la table à dessins, ces dernières deviennent de véritables sources d'anecdotes. Dans les faits, la plupart des histoires du recueil ont comme origine une ou plusieurs tribulations inattendues. L'engrenage de malentendus que généra un innocent portrait de vache au Burkina-Faso ou la longue nuit d'errance (répétée deux fois à une année d'intervalle !) à la recherche d'un coin pour dormir dans une Florence glaciale en sont les deux exemples les plus frappants. Au fil des mésaventures, la lecture n'en devient que plus vivante !
À son époque, Jano (Keubla, Carnets d'Afrique) avait nourri son œuvre de ses pérégrinations, à la différence qu'il avait préféré la fiction au témoignage. Même si Hureau a choisi de s'investir personnellement en se mettant en scène (avec une bonne dose de second degré), ces deux auteurs partagent néanmoins une même vision : celle qui regarde au-delà de l'horizon, avec gourmandise. N'oubliez pas votre passeport et mettez vos vaccins à jour !