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essinateur, scénariste, éditeur, Wandrille commençait à s’ennuyer et à devenir chafouin. Afin de prendre un peu de recul, un de ses amis lui propose un poste d’enseignant à l’académie Brassart Delcourt. Un pro qui connaît tous les aspects du métier ne peut-être qu’un mentor de rêve pour des jeunes artistes en quête de repères. Après avoir considéré le fait qu’il n’a pas l’ombre d’une qualification pédagogique et qu’il est un autodidacte marchant à l’instinct, il accepte le job. Reste juste un peu d’organisation, la rentrée des classes est après-demain et il n’a aucune idée par quoi commencer.
Après les années lycée racontées par Fabrice Erre, c’est au tour de l’enseignement supérieur de se voir décortiqué et démystifié. Autodérision, références à gogo et difficultés de communication, Wandrille tente d’expliquer les mécanismes de base de la bande dessinée à une fournée d'étudiants des générations Y et Z. Au-delà des innombrables gags, vannes et pétages de plomb divers (oui, c’est du papier à dessin, ne pas hésiter à recommencer quand le résultat n’est pas à la hauteur !), l’ouvrage offre surtout un véritable manuel sur "Comment faire des petits miquets ?". En fait, le néo-professeur n’est pas si maladroit que ça et son message passe. De plus, avec de la chance, un ou deux pupilles pourraient avoir du talent, rendant la tâche moins ingrate que prévue, voire gratifiante en fin de compte.
Trait très relâché et construction déstructurée (un comble vu le sujet), les planches ont plus l’allure d’un recueil de dessins de presse que d’une BD classique et fignolée. Ce choix de la spontanéité énergique versus l’académisme peut surprendre, mais, finalement, ne s’avère absolument pas gênant; Il apporte même un décalage supplémentaire à la narration. « Peu importe la manière, l’important est dans ce que vous avez à raconter » est une des notions prodiguées au fil de leçons. L’emballage éditorial est également à relever, particulièrement les têtes de chapitres aux textes hilarants. Déconcerter, oser les contre-sens ou la provocation, tout ça figure aussi au programme.
Compte rendu amusant à défaut de vraiment détonner malgré son style direct et jusqu’au-boutiste, Mes génies a au moins le mérite de lever une partie du voile d’une formation professionnelle à la fois méconnue et un peu mystérieuse.