E
ntrée dans l’adolescence, Melvina affiche une mauvaise humeur perpétuelle. Même Otto, son complice de longue date, en pâtit. C’est encore pire quand il évoque leurs connaissances d’Aldiqua qui l’ont laissée sans nouvelles. Pourtant, quand la jeune fille reçoit une lettre lui annonçant qu’un mal mystérieux s’est répandu dans le pays de ses amis, elle n’hésite pas et franchir la porte menant chez eux. Otto sur les talons, elle découvre des lieux désertés baignant dans un brouillard anxiogène. Épaulée par le garçon, Ben le corbeau et un certain Germain, Melvina prend la route périlleuse de Mondobscur, à l’origine de ce flétrissement général.
Après un premier tome couronné par le Prix Artemisia Jeunesse, voici la suite des aventures de l’héroïne rousse à grosse lunettes, imaginée par Rachele Aragno. Encore une fois, la protagoniste fait fi des avis de son entourage pour mener sa quête tambour battant. À ceci près que le caractère de la demoiselle a bien changé et pas pour le mieux. Engluée dans les questionnements, les doutes et les brusqueries liés l’âge « ingrat », Melvina avance sans s’apercevoir que la personne qu’elle blesse le plus n’est nul autre qu’elle-même. Dans ce registre de la difficulté à s’accepter – moralement et physiquement, la bédéiste italienne connaît son sujet, puisqu’elle insuffle ses propres expériences en la matière. Amplifié progressivement et entretenu au gré des péripéties par des méchants intéressés, cet état d’aveuglement, rendu très justement, trouve sa résolution dans un dessillement fracassant. Par ailleurs, quoique la métaphore fonctionne plutôt bien, l’histoire souffre de longueurs. La partie graphique s’appuie sur un trait lâché mais expressif, rehaussé par des couleurs à l’aquarelle, et sur le jeu des compositions et des cadrages qui contribuent pleinement à l’univers fantasmagorique créé par l’artiste.
Malgré quelques bémols dans la forme, Melvina et le secret du serpent propose une exploration originale des affres de l'adolescence. C'est déjà pas mal.