L
es risques qu'une épidémie d'origine criminelle se répande en ville sont bien réels mais son auteur semble avoir été identifié. Dès lors, le technocrate qui dirige le commissariat local en est convaincu : son arrestation n'est plus qu'une question de temps. Pour l'inspecteur Mizoguchi, les choses ne sont sans doute pas aussi simples qu'elles le paraissent. Son cas personnel risque d'en être la meilleure des illustrations.
L'heure n'est plus à la terreur mais au thriller et à l'exposé des motivations de la figure de l'ombre. Il a minutieusement préparé la contamination qui risque de condamner une partie de la ville, éliminant au passage les coupables d'actes ignobles mais aussi des innocents, bien plus nombreux. La frappe, qui se voulait chirurgicale à l'origine, devrait s'accompagner de dommages collatéraux. Mais il faut s'y faire, c'est devenu une habitude.
Le déroulement du tome 2 l'avait laissé supposer : l'heure est à la confrontation entre celui dont on connait les actes et non la personnalité et les protagonistes. L'échafaudage du suspens ne connaitra pas de développement véritablement significatif. L'auteur a aussi mis de l'eau dans son gore malgré un dernier sursaut assez sanglant, qui permet de se quitter sur une "bonne" note. Pour la conclusion de son triptyque, Tetsuya Tsutsui abandonne le registre de la peur froide pour se concentrer sur le mode opératoire de son psychopathe au profil d'homme ordinaire. A l'opposé des mass murderer ou des serial killers grand guignolesques, ceux-ci peuvent se targuer d'une froide crédibilité. Cet homme pourrait être votre voisin. Celui-ci s'est annoncé comme un bienfaiteur de l'humanité, il se révèle tout au plus être un "ange de la vengeance" relativement ordinaire. A peurs urbaines, exterminateurs ordinaires.
Le constat final est assez classique pour le genre : Manhole s'est révélé plus passionnant dans son art de faire monter la tension que dans sa conclusion, qui n'est pas pour autant à jeter avec l'eau du bain c'est à dire à... l'égout. Il a surtout permis de confirmer tout le bien que l'on pouvait penser de Tetsuya Tsutsui, de son sens du rythme et de sa faculté à composer un récit en s'appuyant sur les peurs de la société actuelle. Duds Hunt et Reset, plus axés sur les nouvelles technologies, l'avaient laissé entrevoir mais souffraient d'un espace trop contraint (un tome de 200 pages peut se révéler trop court ou trop long selon les cas). L'homme sait poser et développer une histoire qui donne le frisson et tient en haleine. Lorsqu'il saura façonner des conclusions irréprochables (mais ceux qui y parviennent se comptent sur les doigts d'une main), il deviendra incontournable.