Résumé: Il n'y a plus de Ligue, extraordinaire ou autre. À Q'umar, la sanglante guerre de l'usure continue. À Kashmir, un terroriste Sikh pourrait conduire le monde vers l'Apocalypse. À Londres, une patiente dans un asile affirme qu'elle détient toutes les réponses... Une fin cataclysmique imaginée par deux grands maîtres du genre, Alan Moore et Kevin O'Neill.
U
n vent mauvais souffle sur l'Angleterre depuis maintenant cent ans. Tandis que la société se désagrège sous le poids de ses tares socio-économiques, les forces occultes d'Oliver Haddo tentent un ultime baroud d'honneur dans leur quête infernale. Les membres de la ligue auront-ils assez de ressources pour sauver le monde, une fois de plus ?
Les aficionados d'Alan Moore sont gâtés. En effet, le maître de Northampton propose un condensé de sa pensée dans la conclusion de la troisième « saison » de La ligue des gentlemen extraordinaires : un monde froid en déliquescence, des héros, certes immortels, mais si fatigués et des méchants aux inspirations scabreuses et nihilistes. Ces préoccupations résonneront sûrement aux oreilles des lecteurs de V pour Vendetta et autres Watchmen. Heureusement, malgré la redite de certaines observations ou situations, le scénariste reste un des plus grands conteurs de l'histoire de la BD. Comme pour les opus précédents, une liste sans fin de références pimente la lecture. De plus, comme le récit se passe de nos jours, ces dernières sont nettement plus accessibles que celle du début du XXe siècle, particulièrement pour celui qui n'est pas un exégète de la culture populaire britannique. Toujours aussi impressionnante, la description de la psychologie des protagonistes – Orlando, Quaterman et, évidemment, Mina – continue à être sans faille, sans pitié même.
Aux pinceaux, Kevin O'Neill répond présent. Son trait, taillé à la serpe, ou plutôt Excalibur vu le contexte, souligne et accentue les propos de l'album. La couverture en est peut-être le meilleur exemple : juchés sur de vagues ruines, des personnages chancellent, leur regard hagard tourné vers le lecteur. Autour d'eux, une menace verdâtre et gluante dégouline. L’esthétique pure est mise de côté pour laisser libre cours à un expressionnisme exclusivement au service de la narration. Le résultat n'est peut-être pas « beau » au premier regard, mais il sonne juste.
Century 2009 clôt cette trilogie avec la manière malgré une certaine usure sur le fond. Le temps des héros toucherait-il son crépuscule ?