Résumé: Honda est une libraire passionnée par son travail. Mais elle mène une guerre, une guerre contre les livres en rupture de stock, une guerre contre les reports et les lecteurs mécontents des retards de livraison, une guerre pour tous ces fans de mangas qui déambulent dans ses rayons à la recherche d'une nouvelle émotion. Récit autobiographique d'une libraire japonaise désormais célèbre, Libraire jusqu'à l'os nous plonge dans le quotidien survitaminé d'Honda.
L
a lutte implacable pour la propagation de la culture via les manga continue de plus belle dans le second tome de Libraire jusqu’à l’os, l’autobiographie choc et décapante signée Honda. D’un côté, il faut gérer des fans sortant de l’enfer sur la piste de leur auteur préféré (il est en dédicace !) ou des clients exotiques aux demandes gênantes (les albums porno gays ? Eh… ils sont là, en bas, à gauche, derrière la colonne, euh… avez-vous des souhaits particuliers ?). De l’autre, il faut alimenter le stock, séduire les distributeurs pour que les commandes arrivent en temps et en heure et maintenir de bonnes relations avec les éditeurs. Rhâaa, les nouveautés de la rentrée viennent d’être annoncées, on va tous mourir !
Malgré son allure complètement déjantée et sa narration venue d’ailleurs (quel que soit le sens de lecture, tout ne coule pas de source, loin de là), Honda raconte avec une précision impressionnante les aléas de son métier. Bien cachée derrière une dramatisation hallucinée, celle-ci ose pas mal de choses et, sans vraiment les dénoncer, elle aligne les défauts de son microcosme au mépris du sacro-saint respect japonais des hiérarchies. À ce propos, le récit des répercussions engendrées par l’oubli de faire lire en avance un chapitre à sa direction se montre des plus révélateurs de cet aspect de la société nippone. Pour le reste, le quotidien du vendeur de livre est présenté méticuleusement et, d'une certaine manière, avec la fierté de faire partie de la chaîne distribuant un art important. Le tout est emballé de clins d’œil plus ou moins nébuleux à la pop-culture et une auto-dérision permanente très réjouissante.
Série de niche par excellence, Libraire jusqu’à l’os n’est pas d’un accès immédiat ou facile. Pourtant, au fil des pages et au prix d’une foule d’explications distillées au coin d’une case entre deux scènes hystériques (toujours très drôles, il faut bien l’avouer), le message passe et séduit. Dernière info, n’éludez pas les histoires bonus en fin d’ouvrage, celles-ci apportent leur lot de révélations indispensables pour la compréhension totale de cette entreprise dessinée improbable.