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n vol d'organes, des êtres translucides, un gène défaillant qui pousse les victimes à se laisser dévorer, autant de cas pour l'équipe de la clinique spirituelle Samizo.
L’entame du tome 1 était séduisante avec l’entrée en scène de Köhei, personnage dont le corps est composé de parties de plusieurs autres et qui prétend être le Léviathan, créature annonciatrice de la fin des temps. Il y avait aussi la stagiaire en médecine, personne un tant soit peu normal bien qu’elle soit « croqueuse » de psychopathes en dehors des heures de garde, pour faciliter l’immersion dans cet univers où l’organe est au centre des intrigues. A titre d’illustration, la symbolique induite par le travesti, dépositaire de quelque chose en trop ou en moins, ou le recyclage du tératome, ce fœtus parasite qui avait donné une mignonne petite compagne au Blackjack de Tezuka, avaient quelque chose de sympathique. Tout comme l’idée de la « clinique spirituelle » où l’on opère pour ainsi dire à mains nues ou encore la notion d’ « être multiple » qui confère à l’auteur le titre de docteur es « chaos de la personnalité ». Avec ce casting, ces intentions, Eiji Ohtsuka le créateur de MPD Psycho aux manettes et un dessin précis et fort en contrastes, il y avait de quoi saliver si l’on est disposé aux histoires tordues.
Les plaquettes peinent certes à coaguler mais les précipités ne sont pas ceux que l'on attendait. Les quatre énigmes tout à fait fades de ce deuxième recueil sont résolues en deux coups de cuillères à pot. Cuillère qui sert au passage à déguster la cervelle encore fumante d’une lycéenne en uniforme, call girl à ses heures et victime consentante. Alors gore ? Oui mais sans le génie qui fait frémir ni l’humour qui sauve certaines situations du Grand guignol . Et l’on baille à répétition dans ce tome 2. Où est passé le thème de l’Apocalypse annoncé sur le théâtre encore fumant d’un champ de bataille en Europe de l’Est ? Qu’a-t-on véritablement fait des dangers liés aux expérimentations génétiques ? (le danger du prion est exécuté ici avec l’enthousiasme clinique d’un groupe de fonctionnaires des services vétérinaires venus abattre un cheptel infecté par l’ESB) Ce qui étonne aussi c’est que l’un des thèmes centraux soit la chasse aux étrangers, aux non japonais de souche (sans jeu de mots), orchestrée par un homme en noir mandaté par les autorités publiques. Curieux, vraiment. A double sens ? Allez savoir. Le mal de la série, sans vouloir livrer un diagnostic hâtif, réside peut-être dans la volonté de vouloir traiter l’intrigue en 40-60 pages (soit deux épisodes dans un périodique) et de ne pas disposer d’un fil rouge digne de ce nom.
« Un ange attend les élus à la porte du Paradis, tandis que le Léviathan attend les damnés à celle de l’Enfer ». Et pour le lecteur de manga, c’est quelle porte ?