Résumé: Jerry Stobbart est un inspecteur de police abruti et irresponsable aux capacités limitées et à la maturité d’un enfant de 10 ans. Il est chargé d’enquêter sur un serial killer et se retrouve embarqué, malgré lui, au cœur d’un complot lié au diabolique président des États-Unis et à une secte d’illuminés. Une enquête sanglante, humoristique et absurde, proche du non-sens.
Q
uand Jerry Stobbart arrive sur les lieux du crime, mieux vaut prévoir un périmètre de sécurité assez large : il peut être source de danger pour les badauds et les curieux qui s’agglutinent alentours. Dans le genre "catastrophe ambulante", il est sans égal et il y a fort à parier que la notion de dommage collatéral a été inventée pour un type comme lui. Dans Contre le serial killer, Jerry aura à faire avec un serial killer (implacable logique, n'est-il pas ?), un légiste pervers, la Confrérie de la lumière, Batman et le Président des Etats-Unis. C’est tout ? Ce n’est que le tome 1, n’exagérez pas non plus…
Nouvelle création publiée sur le web et reprise en album, Jerry Stobbart ne fera pas l’unanimité. Déjà, sur le principe, il y a les allergiques à ce genre d’initiatives. Quelques 256 strips de trois cases au graphisme spartiate publiés entre juin 2006 et décembre 2007 sur lapin.org ne feront jamais un album selon certains. La recette est connue : l’auteur creuse son sillon en se laissant porter par le fil de ses délires, au jour le jour, voire au gré des commentaires laissés par les fans. Et puis les trucs volontairement estampillés « débile » c’est cool à lire à petite dose et si la formule du feuilleton sur un blog s’y prête tout à fait, dans le cadre d’un album, c’est l’indigestion quasi-assurée.
Pas faux. Mais il ne faut pas oublier de piétiner ses principes de temps en temps pour rester à l’affût d’une bonne surprise. Suffit de se rappeler, sans que le web n’y soit pour quoi que ce soit, les premiers pas d’auteurs devenus incontournables qui eux aussi apprenaient à dessiner cases après cases. Certains d’entre eux sont même devenus directeurs de collection. C’est le cas de ALE, dont le trait se fait plus convaincant strip après strip (pour ce qui est de donner le feu vert à l’édition de projets de jeunes pousses, patientons encore un moment). Mention spéciale à l’utilisation de photos pour certains arrière-plans qui renforcent l’effet comique et évitent la monotonie (l’autoroute, la cabine téléphonique).
OK mais arrêtons de noyer le poisson : faut-il lire Contre le serial killer ? Pour ceux qui se sont esclaffés bruyamment devant les Police squad ! du trio Zucker-Abrahams-Zucker et ont continué à pouffer, mais de moins en moins, avec sa déclinaison cinéma, Naked gun (Y a-t-il un flic pour... ? en terre francophone), la réponse doit être oui. Jerry pourrait être le rejeton d’un Frank Drebin passé par South Park et Springfield : incapable majeur dans tous les sens du terme, ce type est un abruti entouré de crétins. Dès lors, pas de surprise à voir l’humour et les slips kangourous voler bas. Le genre est détourné, piraté, ridiculisé, du début à la fin. Il n’en ressort pas une parodie ou une accumulation de références maltraitées mais une grosse tranche (mille-feuilles serait trop aérien et gastronomique) de délire autour d’un genre. Pas la découverte ni la catastrophe du siècle mais des promesses affichées par un jeune auteur qui a le sens du strip et de son rythme bien particulier.
Sur son blog Le blog du mec qui fait Jerry Stobbart , Ale annonce son retour sur la toile pour le début du mois de juillet. A bookmarker. Pour la catégorie "favoris", attendons encore un peu pour se prononcer.