Info édition : Un ex-libris couleur non signé offert dans la première édition.
Résumé: 29 octobre 1628, le Batavia quitte le port d’Amsterdam. À son bord, 341 personnes, dont 38 femmes et enfants: des marins, des artisans, des soldats, des officiers et quelques passagers qui voyageront sur le Château arrière, le lieu de l’élite du navire. Le navire appartient à la toute-puissante Compagnie hollandaise des Indes orientales, la VOC. Il doit rejoindre Java pour y charger les épices qui font la richesse des actionnaires de la Compagnie.
Amsterdam est alors le plus grand entrepôt d’Europe ; la Hollande vit un âge d’or de prospérité et de liberté. On dit Amsterdam tolérante, les esprits libres et les opprimés viennent de toute l’Europe s’y réfugier.
« Paradoxalement, en partant au 17° Siècle, j’ai retrouvé des questions économiques et politiques qui m’intéressent. » explique Christophe Dabitch « Le récit intervient dans un contexte où Amsterdam invente la bourse et donc une forme du capitalisme, un grand cycle dans lequel nous sommes toujours. La Compagnie des Indes est l’une des Compagnies commerciales les plus puissantes de l’histoire. En faisant le grand écart, je me suis demandé quels liens pouvaient exister entre cette Histoire et l’histoire meurtrière de Jeronimus. »
Parmi les hommes présents sur le Batavia, Pelsaert, Commandeur responsable des affaires commerciales, vrai patron du navire, même s’il n’est pas marin, le capitaine Ariaen, responsable du bateau mais sous les ordres de Pelsaert et Jeronimus Cornelisz, un apothicaire de Haarlem, qui fuit la terre des hommes, incapable de se remettre de la mort par la syphilis de son bébé, et de la suspicion sur sa femme que cela a engendrée.
Au cœur de ce monde d’hommes, Lucretia. Après plusieurs mois en mer, elle devient l’objet de conquêtes, discrètes de la part de Jéronimus, plus directe de la part du commandeur et du capitaine.
Mais le Batavia n’arrivera jamais à Java. Le nom de ce navire deviendra le synonyme d’une terrible expérimentation sur des îles perdues au large de l’Australie. Une expérience humaine menée par Jeronimus Cornelisz, que rien ne semblait prédestiner à jouer ce rôle.
« Le personnage principal se nomme Jeronimus et, au vu de l’histoire, on le présente généralement comme un psychopathe et un hérétique pour expliquer son parcours. Ce qui n’est pas faux. Mais c’est un homme que rien, a priori, ne prédisposait à devenir ce qu’il est devenu à l’occasion de ce naufrage. C’est une histoire très connue en Hollande ou en Australie mais très peu en France. »
J
anvier 1628. Jeronimus Cornelisz, apothicaire d’Haarlem, traverse une période sombre. Son fils unique est atteint de syphilis et il soupçonne la nourrice d’être à l’origine de la transmission de la maladie. Le peintre Torrentius a été arrêté, au motif d’hérésie, et est soumis à la torture. Son emprisonnement fait peser un gros risque sur le cercle de ses adeptes et amis. Après le décès de l’enfant, les clients désertent la boutique, rajoutant une difficulté financière à ses doutes et tourments. Huit mois plus tard, Jéronimus tourne la page et part seul pour Amsterdam. Le 29 octobre 1628, il embarque sur le Batavia, l’un des fleurons de la VOC, Compagnie hollandaise des Indes Orientales, en qualité d’assistant du commandeur. Une nouvelle vie commence.
Dans Abdallahi et La ligne de fuite, les personnages d’Arafanba et d’Adrien étaient fictifs. Ici, tous les protagonistes de Jéronimus ont réellement existé. Les faits retranscrits (incarcération de Torrentius, coup de tabac, escale, incident provoqué par Arien Jacobsz sur un des navires de l’escorte…) se sont déroulés tels que contés. La seule liberté que semble s’être octroyée Christophe Dabitch concerne les hypothèses émises sur la façon dont se sont tissés les liens, construites les circonstances et élaborées les manigances qui conduiront à la future tragédie. Sans oublier, bien sûr, la teneur des conversations et des pensées intimes.
La partie introductive de l’album situe le contexte dans lequel s’effectue le départ du « retourship ». Elle présente les circonstances qui ont amené celui qui deviendra l’instigateur du drame à tout quitter, évoque les influences et les antagonismes spirituels de l’époque, précise l’attrait d’Amsterdam, ville bourgeoise, prospère et tolérante, de même que celui de la VOC. Sa lecture est un peu fastidieuse du fait de la multiplication des voix off par lesquelles sont transmises les nombreuses informations.
Tout s’anime et devient fluide lorsque le récit s’installe sur le bateau. Conditions de vie à bord, nature des relations entre les responsables, l’équipage et les passagers, portrait psychologique des différents acteurs, évènements... l'ensemble est tissé au fil des voix off, dialogues et autres planches muettes, parfois décalées par rapport au texte, qui alternent et se complètent. La narration gagne progressivement en rythme et en puissance.
Le matériau qu’utilise Jean-Denis Pendanx lui permet, une fois encore, de montrer l’étendue de son talent : les illustrations, de toute beauté, sont autant de tableaux à contempler. Aussi à l’aise pour restituer les ambiances sombres que lumineuses, les paysages, les expressions des visages ou l’extériorisation des sentiments, il magnifie le récit. Il est plaisant de l’imaginer ajouter les couches supplémentaires de gouache et donner les petits coups de pinceaux facilement repérables dans les parties mouchetées.
Premier tome d’une série de trois, Un homme neuf pose les bases d’un drame historique donné à voir pour la première fois. L’association Dabitch/Pendanx fonctionne de nouveau à la perfection et laisse présager que, une fois le travail achevé, la qualité de l’ensemble fera merveille. Les faits sont connus, l’histoire déjà écrite, et pourtant, sitôt l’ouvrage refermé, l’envie de découvrir la suite se fait pressante...
Les avis
Erik67
Le 05/09/2020 à 15:48:22
Voilà une histoire vraie de mutinerie qui nous est conté et dont j'ignorais jusqu'ici l'existence. Pourtant, ce fut l'un des plus terribles drames ayant secoué la fameuse compagnie des Indes Orientales au XVIIème siècle. On suit ici le parcours de l'un des hommes clés de cette tragédie: un certain apothicaire du nom de Jéronimus qui va fuir sa propre ruine et découvrir une autre de ces facettes en décidant de tirer profit des situations rencontrées.
Le dessin fait dans l'impressionnisme. D'ordinaire, je trouve cela très beau. Ici, j'ai eu de la peine pour reconnaître les traits des personnages. L'imprécision graphique m'ennuie toujours quand je parcours une histoire...
Je dois cependant reconnaître que les couleurs sont très belles et procurent un véritable cachet à ce récit ancré dans une réalité historique. On a l'impression de rentrer dans des tableaux de maître et découvrir la vie de ces hollandais qui partaient à la conquête du monde en inventant le capitalisme. Le choix des cadrages est également judicieux. Bref, un excellent travail. Les couvertures peuvent déjà en témoigner par leur beauté graphique.
Par ailleurs, il y a une narration un peu inhabituelle qui nous plonge dans une certaine gravité. On ne s'attachera pas facilement au héros à cause de cette distanciation. Le premier tome fait 80 pages. Il ne se passe pourtant pas grand chose. Tout sera un peu précipité dans la seconde partie beaucoup plus riche en action. On pourrait penser que ce déséquilibre nuit un peu à l'ensemble mais ce n'est pas le cas. Il est clair que les auteurs ont pris leur temps pour installer leurs personnages et leurs psychologies propres ce qui n'est pas entièrement pour nous déplaire.
Le navire « le Batavia » semble être un personnage à part entière. Son destin va l'amener à s'échouer sur un récif situé à 80Km des terres australiennes encore vierges. Bref, un périple de 24000 kilomètres: le bout du monde pour cette époque.
cinefilmo
Le 26/11/2008 à 12:05:55
cet album est dans la droite ligne du dessin tres impressioniste du dessinateur PENDAX.
Le scenario est interessant mais la linerarité de la narration ne m'a pas passionné, j'ai eut du mal a accroché malgré de superbes planches plus proches de la peinture que du dessin.
Bref un album de bonne tenue avec toujours la beauté des albums de l'éditeur Futoropolis