Résumé: Okada Kenzô, 60 ans, est licencié à la veille de sa retraite, après une vie consacrée à son seul travail. Sa femme et ses enfants le quittent, et laissent un compte en banque vide. Décidé à en finir, il revient dans sa région natale mais la branche à laquelle il se pend se brise. Toujours en vie, il choisit alors de commencer une nouvelle vie dans cette nature qui a refusé de le laisser mourir...
B
rutalement licencié alors qu’il approchait de la retraite, Kenzô Okada trouve un jour son appartement vidé. Sa femme et ses enfants ont quitté les lieux, emportant tout, et ne répondent plus au téléphone. Grâce aux quelques yens qui lui restent, l’employé falot se rend dans sa région natale pour en finir avec une existence bien fade. Mais le destin en a décidé autrement : la branche fatidique rompt. Un peu amoché et secoué, Kenzô est désormais déterminé à profiter de la vie aussi longtemps que son corps le lui permettra. Préférant la nature à la vie urbaine, le sexagénaire s’enfonce dans la forêt et entreprend d’y vivre en ermite. Encore faut-il qu’il surmonte son dégoût des insectes, qu’il trouve à se nourrir et à s’abriter…
Dans Je ne suis pas mort, Hiroshi Motomiya met en scène un Japonais type - père de famille travailleur, méticuleux, mais peu présent apparemment - , qui, ayant tout perdu, se révolte et cherche dans la nature un moyen de vivre loin d’un système qui lui a montré ses limites. L’auteur choisit de n’évoquer le passé de Kenzô qu’au travers de quelques courts flashbacks éloquents et rappelle qu’il a – a eu – une épouse et des enfants par de brèves apparitions de ces-derniers s’interrogeant avec cynisme sur ce qui est advenu de lui ou de sa dépouille. Soulignant le courage et l’abnégation du personnage principal, le récit s’attache donc, dans la première moitié de l’album, à faire part de ses premières difficultés d’adaptation à son nouvel environnement, de son existence d’ermite et de son quotidien dans les bois.
A mi-album, l’apparition d’une jeune femme en perdition fait basculer l’histoire qui gagne en épaisseur et permet d’approfondir un peu la réflexion proposée puisque Kenzô a désormais quelqu’un à charge. Pourtant, cette arrivée apporte aussi un zeste de mièvrerie en raison de l’attachement excessif de la nouvelle venue et de ses propos dégoulinant de ferveur amoureuse qui confinent un peu trop au pathos. Dommage, car aussi bien sa grossesse que son accouchement pénible, ainsi que les blessures de Kenzô suite à une chasse au sanglier, permettent de constater que la survie est possible même loin de toute assistance ultra-médicalisée et amènent à s’interroger une fois de plus sur notre société bien réglée et sécurisée. En outre, bien que son one-shot se situe dans la veine sociale, Motomiya se contente d’esquisser sa dénonciation d’un monde consumériste, hypocrite et oublieux des valeurs humaines, préférant se concentrer sur la force de caractère, la combativité de ses protagonistes et leur capacité à se surpasser. C’est au public d’affiner la méditation.
Doté d’un dessin réaliste prenant plaisir aux détails et à l’expressivité des personnages, Je ne suis pas mort s’avère rapidement intéressant et prenant. C'est suffisant pour s'y pencher.
Les avis
Erik67
Le 01/09/2020 à 10:28:53
Je ne suis pas mort est l'histoire de la rédemption d'un homme qui se découvre à l'aube de sa vieillesse dans le genre "il n'est jamais trop tard pour bien faire". Il vient en effet d'atteindre l'âge fatidique des 60 ans. Il n'est plus qu'un vieux débris pour sa famille et pour ses collègues de travail. Alors, il est viré manu militari de son emploi car il n'a pas su s'adapter à l'ère de l'informatique. Son épouse lui laisse un mot pour lui indiquer qu'elle le quittait illico presto. Elle a prit soin bien entendu de vider les comptes en banque et de changer de numéro de portable. Cet homme a tout perdu en l'espace d'un instant. C'est vraiment triste... :((
C'est vrai que cela fait cliché et que les ficelles paraissent très grosses. Mais je n'y peux rien : j'ai éprouvé tout de suite de la sympathie et j'ai eu envie de connaître l'histoire de cet homme qui commence véritablement le jour où la branche de l'arbre cède alors qu'il voulait se pendre. Il va totalement se retirer du monde pour vivre en harmonie avec la nature. Cela ne sera d'ailleurs pas chose facile.
L'auteur a voulu démontrer qu'il ne faut pas être matérialiste, qu'il faut retourner vers les vraies valeurs et vivre en harmonie avec la nature. Bref, des thèmes très écologistes qui peuvent paraître utopiques ou passéistes à bien des égards.
Il y a des choses ou des comportements qui m'ont parfois agacé (par exemple le repli sur soi) mais je me suis laissé emporter par l'essentiel. Cette histoire est touchante avec une fin véritablement poignante. A ma grande surprise, ce titre fait tout de même partie de la sélection officielle du festival d'Angoulême 2010.
brekkie
Le 26/10/2009 à 03:38:54
Un très bon manga tout à lire absolument. Le dessin n'est pas fabuleux, mais plus que correct. Le scénario est vraiment captivant. Il laisse après lecture une impression brute, forte "dans notre coeur d'animal où la pluie n'a pas cessé de tomber" (Pascal Auberson). Je ne peux pas mieux le résumer.