Résumé: 1947. Bien que l’Allemagne nazie soit tombée, le cauchemar pour les Juifs d’Europe n’est pas terminé. Persécutés par les communistes, abandonnés par les Alliés, leur route vers la terre promise d’Israël a encore des allures de long calvaire... Cette réalité, la jeune Oliwka la découvre brutalement lorsqu’on lui apprend qu’elle avait été confiée, encore bébé, à une famille adoptive pendant la guerre. Que sa véritable identité avait été changée pour échapper aux nazis. En réalité, elle s’appelle Astar Berkenbaum. Elle est juive. Et comme des milliers d’enfants, elle ne doit la vie sauve qu’à une femme : Irena Sendlerowa.
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ologne, 1947, un inconnu débarque en pleine messe clandestine pour emmener Oliwka. Celle-ci apprend qu’elle s’appelle en vrai Astar, que ses parents ont disparu comme de nombreux juifs pendant l’occupation nazie et que sa vie se trouve désormais en Israël, loin de sa famille adoptive. Une existence qu’elle doit à une femme qui, fin 1943, était emprisonnée dans les geôles de la Gestapo. Soupçonnée d’aider les victimes de la Solution finale, parlera-t-elle sous la torture ?
Alors que le tome précédent avait laissé l’héroïne dans une situation des plus périlleuses, le troisième volet d’Irena débute par un saut temporel de quelques années pour évoquer le devenir d’une des enfants sauvés grâce à l’engagement et au dévouement de la Juste. Intelligemment construit et s’intégrant bien à l’ensemble du récit, cet intermède répond à une question essentielle, tout en donnant un aperçu des obstacles que les jeunes rescapés ont dû affronter au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Après une transition habile, Jean David Morvan et Séverine Trefouël se concentrent de nouveau sur Irena Sendlerowa. Toujours en usant de flash-back, ils entraînent le lecteur à la suite de la Polonaise lors de sa descente dans les enfers gestapistes, font une incursion dans le soulèvement du ghetto de Varsovie et de sa répression sanglante, avant de relater comment l’infirmière sociale s’en est sortie grâce à l’appui de ses amis.
Quelques bonds succincts dans l’enfance, de rares moments plus oniriques ainsi que l’anecdote des bocaux constituent autant de respirations dans une atmosphère dramatique qui restitue de manière convaincante la terrible réalité de l’époque. Une tragédie que le dessin de David Evrard rend palpable à travers un trait rond et expressif qu’accompagne agréablement la mise en couleurs de Walter. Rictus cruels et exactions de l’occupant allemand, doutes et tristesse marquant les visages et les cœurs, ou rires épars malgré la tourmente, les émotions sont transcrites avec justesse et dénotent une grande humanité. En outre, les cadrages sont variés et le découpage assure une bonne lisibilité.
Avec son titre plein d’à-propos, Varso-vie s’inscrit dans la lignée des deux premiers volets et offre une nouvelle page puissante autant que touchante de l’histoire d’Irena Sendlerowa. Une destinée riche à bien des égards et sur laquelle les auteurs s’étendront encore dans deux albums, bien que celui-ci s’achève sur la disparition de cette femme engagée, dont on fêtera prochainement le dixième anniversaire (le 12 mai 2018).