Résumé: Novembre 1935. Pessoa vit ses derniers jours. Simão Cerdeira, jeune pigiste au Díario de Lisboa, est chargé de rédiger la nécrologie de cet écrivain dont il ignore tout. L'apprenti journaliste va méticuleusement remonter la piste, interrogeant les principaux témoins de l'existence de ce personnage énigmatique. En parallèle, Pessoa prépare sa sortie. Aura-t-il le temps d'achever ce « Livre de l'inquiétude », basé sur les confidences de son ami Bernardo Soares et qui lui tient tant à coeur ?
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ernando Pessoa va mourir. Son corps est en train de rendre l'âme. À l'approche de son décès, il part sur les traces de son passé, dans une déambulation nostalgique qui le ramène à certains épisodes de sa vie. En parallèle, un journal commande une nécrologie du poète à un jeune pigiste, aspirant écrivain. Tandis que Simão Cerdeira part à la rencontre des amis du poète lisboète, ce dernier remonte le fil de sa vie et de son œuvre si singulière. En effet, en plus des textes signés de son nom, il a produit de nombreux textes sous d'autres noms. mais il ne s'agissait pas de pseudonymes au sens classique du terme. Derrière chaque hétéronyme, comme il les définit, se dissimule un avatar à part entière, possédant un style propre, des opinions et même une vie.
Ainsi, Bernardo Soares est un modeste employé de bureau dont les aphorismes et réflexions constitueront le Livre de l'intranquillité, chronique du désenchantement face au monde. Alvaro de Campos, l'ingénieur maritime maniaco-dépressif, incarne quant à lui la désillusion face au modernisme. Près de septante-deux alias collaborent pour composer un corps littéraire complexe et multiple, dans lequel l'écrivain trouve une liberté totale.
La fascination de Nicolas Barral pour ce personnage ne fait aucun doute. À travers ce récit, il explore cette personnalité fascinante à la fois par la perspective extérieure d'un admirateur et en confrontant le créateur à ses créations, lors d'un ultime affrontement qui permettra de réconcilier l'artiste et son art. Cette bande dessinée crépusculaire rend hommage singulier à un auteur unique, pour qui écrire valait mieux que vivre. Il convient sans doute d'être sensible à ce genre de démarche qui confine à la mystification littéraire, pour pleinement apprécier cette "presque" biographie, nostalgique et à la limite de l'absurde, qui interroge sur le processus créatif d'un génie complètement atypique.