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la fin du IIIème siècle avant notre ère, l'Egypte a perdu de sa superbe. Successivement envahie par les Perses puis par les Macédoniens, elle vit à cette époque sous le règne de Ptolémée, un des anciens généraux d'Alexandre le Grand. A la mort de son père, Hotep, un jeune Egyptien, lui succède en tant que grand prophète d'Amon à Karnak, un village situé près de Thèbes. L'entente entre les deux peuples est plutôt bonne dans le respect des coutumes et des traditions. Hélas... L'arrivée d'un nouvel épistatès (un représentant du pouvoir central grec basé à Alexandrie) va bouleverser ce fragile équilibre. Celui-ci, avide d'argent et de pouvoir, décide d'augmenter inconsidérément l'impôt et surtout profane le lieu de culte d'Amon. Hotep tente de s'opposer à cet oppresseur.
Le destin de Rafael Moralès est intimement lié à l'œuvre de Jacques Martin, le créateur d'Alix. Dès 18 ans, il est engagé comme assistant auprès de celui qui deviendra son mentor. Il est ensuite désigné, après la sortie du tome 21 (Les Barbares) qu'il a réalisé seul au dessin, comme le repreneur officiel de l'intrépide héros blond. En 2006, quelques années et albums plus tard, Martin passe la main à un comité éditorial et la collaboration entre les deux hommes s'achève. Passionné d'Egypte ancienne, Moralès saisit au vol l'occasion de réaliser, à 38 ans, son premier album en solo. Hotep est né.
La période historique racontée ici est une époque charnière du destin de l'Egypte. Sur le déclin, le pays tente de conserver ses richesses et de préserver l'héritage de la civilisation des pharaons. Le personnage d'Hotep se pose en gardien de ce passé. Les thèmes abordés sont à la fois très actuels et universels : la corruption, le choc des cultures, le respect d'autrui, la tolérance... L'intrigue est plutôt classique mais a le mérite de faire découvrir des paysages et des villes antiques dont les décors sont parfaitement maîtrisés. Même si l'exacte architecture d'Alexandrie, dont il reste très peu de vestiges, n'est peut-être pas scrupuleusement respectée, admirer son phare légendaire ou son port mythique demeure un pur moment de plaisir. En revanche, les visages des personnages suscitent nettement moins d'enthousiasme. Souvent approximatifs, dégageant très peu d'expressivité, ils ternissent malheureusement le récit à des instants où l'émotion devrait pourtant être bien présente.
Ce premier tome d'Hotep est une bonne surprise. Les lecteurs d'Alix ne seront certes pas dépaysés, la filiation artistique des deux auteurs étant évidente dès les premières pages. Ils découvriront cependant une histoire intéressante à défaut d'être passionnante ainsi que des personnages traités de façon bien plus moderne que ceux de Jacques Martin. En bref, ils passeront un très agréable moment.