C
omme chaque soir, Dracula se réveille et s’extrait difficilement de son cercueil aidé par son fidèle serviteur, Igor. Ce n'est pas la forme pour le Comte, il dort mal, fait des cauchemars et tenir son rang devient de plus en plus éreintant. Et puis, les formalités, la paperasse administrative, les villageois en colère… Ah, il faut se la coltiner l'éternité !
Album finlandais, Horreur Cosmique est une fable décalée et hilarante. Un peu à la manière de Lewis Trondheim et Joann Sfar dans Donjon, Peppe Koivunen s'est emparé du personnage emblématique de Bram Stoker pour se moquer des clichés : « Lovecraft, voilà un grand écrivain qui s'y croit : que les histoires soient terrifiantes, d'accord, mais il pourrait au moins donner quelques indications sur ce qui se passe. » ainsi que la société en général (la relation maître – valet, la perception des différences et les habituelles misères de l'administration). Le ton passe de la farce à la parodie tout en étant teinté de réflexions quasiment philosophiques. De plus, malgré ce sommaire quelque peu disparate, Koivunen réussit à maintenir une grande cohérence à son propos. Ça tire dans tous les sens, mais ça vise toujours juste !
Avec son trait qui rappelle les délires de Francis Masse et certains travaux signés du Mœbius de l'époque Métal Hurlant, Aapo Rapi illustre cette histoire fantastico-humoristique avec beaucoup de fougue. Le découpage va dans tous les sens sans trop de logique narrative. Des planches de cinq ou six bandes de minuscules cases alternent avec de grandes illustrations pleine page et des épisodes muets voisinent avec des passages débordants de phylactères. Paradoxalement, comme pour le scénario, l'ensemble s'avère totalement abouti et, au final, facile d'accès. Les couleurs quasiment psychédéliques renforcent encore l'atmosphère ubuesque de ces tribulations.
Mêlant habilement références culturelles et observations grinçantes, Horreur cosmique fait mouche !