Résumé: Hideki est bien occupé, maintenant qu'il est papa, et Yomogi, l'agente immobilière, fait la connaissance d'un écrivain à la recherche d'un appartement. L'automne est là, et tandis que la galerie de personnages s'agrandit, l'amour frappe par surprise au festival de la fac.
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atsumi commence dans le monde du manga, suite à sa victoire lors d'un concours. Son tento est un vieux baroudeur du marché et il va le pousser dans ses retranchements. Combiner aspiration professionnelle, études et les premiers émois amoureux est une équation délicate pour la cousine d'Hiroto. Ce dernier vivote comme d'habitude, mais des évènements vont raviver la nostalgie d'un passé pas si lointain, en particulier lorsqu'il reçoit son ami Hideki accompagné de son bébé.
Le mangaka étoffe son univers progressivement. Ainsi, la galerie des protagonistes s'agrandit dans ce volume, ce qui densifie les récits proposés. Hiroto Ikuta reste le personnage principal, mais il est utilisé comme une clef de voute. Ce qui est astucieux, puisque cela permet à l'auteur de faire graviter autour du feeter d'autres protagonistes ayant leur propre histoire venant plus ou moins se greffer à la vie quotidienne d'Hiroto. L'effet de narration chorale est efficace. Ainsi Yomogi, l'agente immobilière, se dévoile davantage, ce qui permet à Keigo de montrer la dualité des individus entre leur vie privée et le masque porté en public ou au travail. La froideur, que Yomogi affichait dans le premier tome et qui s'effritait un peu dans le deuxième, fait place ici au côté fun d'une jeune femme qui veut croquer la vie à pleines dents (quitte à ne plus loger dans son maillot de bain) tout en assimilant la pression sociétale du monde professionnel. Sa rencontre avec le jeune écrivain à succès apporte, dès lors, un nouvel élément scénaristique : le triangle amoureux. La succession des chapitres l'évoquant est drôle, puisque l'auteur joue avec les codes de cette technique scénaristique en mettant parallèle Ryo Ishikawa et Hiroto sans qu’ils ne se croisent pour le moment. L'arrivée de nouveaux individus et le suivi de ceux déjà connus permettent au mangaka de poursuivre l'exploration de thèmes qui lui sont chers : la fougue de la jeunesse et sa manière de vivre dans une société codifiée, la manière de vivre en dehors de ces normes sociétales, l'évolution liée à l'âge, le regard des autres et ses conséquences sur soi. Dans cette série, il le fait par un prisme empreint de douceur et de nostalgie sur le temps qui passe, avec une petite pointe de critique, alors que dans Mauvaise herbe, le ton était plus dramatique, noir et cinglant. Bref, la construction et le déroulement de la narration sont maitrisés de bout en bout.
Cette ambiance est due également au style du dessinateur. Les visages en rondeur des personnages contribuent à générer un effet apaisant, tout en arrivant à faire passer le large panel d'émotions dont l'histoire a besoin. Les décors sont soignés, renforçant l'effet d'ancrage dans la vie de tous les jours.
Ce troisième opus d'Hirayasumi entraine, avec douceur, les lecteurs dans le quotidien de jeunes Tokyoïtes. En orchestrant intelligemment un jeu de chassé-croisé entre ces derniers au travers des chapitres, Shinzo Keigo dévoile son talent de conteur social. Un manga passionnant et plaisant dont les bédéphiles attendent impatiemment le tome suivant.