Résumé: Deux androïdes victimes d'une « panne » vivent une histoire d'amour dans le même rêve. Un jeune garçon trop distrait voit s'écouler une journée en l'espace de quelques minutes. Suite à la consommation d'une drogue étrange, un homme se retrouve prisonnier d'un rêve sans fin... Ce n'est qu'un aperçu des histoires fantastiques, terrifiantes, poétiques ou bouleversantes que nous raconte Keiichi Koike, le génial auteur d'Ultra Heaven. Une plongée indescriptible et vertigineuse dans l'univers du temps et de ses paradoxes, par le nouveau maître du genre, digne successeur de Katsuhiro Otomo (Akira) et figure prometteuse du manga d'anticipation.
U
n homme est perdu à jamais dans le monde virtuel que lui ont fait tester des apprentis sorciers. Deux androïdes qui se rencontrent dans un ailleurs étrange suite à une panne de leurs système. Un garçon peu loquace vit l’expérience d’une journée s’écoulant en quelques secondes. Un dealer est enfermé dans une spirale sans fin, suite à la consommation d’une puissante substance hallucinogène. Un samouraï traverse les siècles après être monté sur un bateau venu d'Occident. Un passager est en proie à un songe glauque. Un consommateur de conserves voit le monde se déliter en spirales à cause d’une simple clé à sardines. Autant d’expériences, autant de songes, autant de paradis artificiels…
Heaven’s door se compose de dix nouvelles plongeant dans une succession d’univers surréalistes relativement hermétiques. Keiichi Koike y fait suinter les drogues, les fantasmes, les peurs et la folie, perdant le lecteur dans des méandres obscurs et abscons dont il est malaisé d’émerger. Le temps, l’environnement, le corps même échappent à tout contrôle, conduisant à une sorte de chaos où sévit un délire téméraire. Par ailleurs, au fil des pages, tant graphiquement que dans la présentation des récits, les influences d’un Otomo, d’un Moebius ou d’un Dali prolifèrent et pourraient suffire à trouver quelque plaisir à ce qui semble n’être qu’un vaste assemblage de chimères mal digérées ou un patchwork d’épisodes cauchemardesques dont on n’a qu’une envie : s’enfuir, s’affranchir, tant ils mettent mal à l’aise. Le vertige est tenace, jusqu’à la fin – les deux dernières histoires se lisant même dans le sens occidental – et la nausée n’est pas loin, l’impression de tanguer l’emportant sur le fond.
A moins d’être en condition, de s’adonner aux délices éphémères de quelques paradis artificiels pour mieux pénétrer l’ambiance, il est difficile d’appréhender cet ouvrage qui laisse le goût amer d’être passé à côté.