L
es Vosges, janvier 1917, il fait froid sur le front. Palette, Le Bourhis et Bixente, cantonnés dans une ancienne usine, jouissent d'un confort tout relatif. De retour d'une mission de combat, une unité des redoutables Corps Francs se joint à leur campement. Ces sinistres « camarades » vont venir ébranler les convictions de chacun. La guerre oui, mais à quel prix ?
Se basant sur une anecdote authentique – dommage qu'aucune référence bibliographique ne soit proposée -, Olier explore une question morale majeure : où se situe la frontière entre l'humanité et la barbarie ? Présenté ainsi, le scénario pourrait sembler rébarbatif. Ce n'est absolument pas le cas, comme dans Le plateau du croquemitaine, le premier tome de la série, le récit est conté sur un mode jeunesse et humoristique. La narration n'en est pas mièvre pour autant. Le propos est grave, raconté sans fioritures et parfaitement expliqué, sans aucun tabou. Le scénariste réussit à maintenir le bon équilibre entre sérieux et divertissement. Toutefois, il peine à donner de vrais rôles à ses protagonistes principaux qui restent, à l'exception du capitaine Mougin, de simples spectateurs face aux évènements. De plus, le fin mot de l'intrigue, très simpliste au demeurant, effrite quelque peu le plaisir de la lecture. L'oreille coupée n'en reste pas moins un excellent album pour faire découvrir d'une manière originale une certaine réalité de la Première Guerre mondiale.
Entre caricature et réalisme façon « gros nez », Marko illustre cet opus avec un talent certain. Les personnages et décors sont très bien rendus et magnifiés par l'utilisation intensive de l'aquarelle. Cette approche, complètement maîtrisée, donne une atmosphère unique aux différents épisodes. Un petit bémol à propos de la mise en scène qui, très basique et répétitive, enlève passablement d'impact aux planches.
Mêlant intelligemment aventures et gravité, L'oreille coupée devrait passionner les historiens en herbe ainsi que les plus expérimentés.