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u’ont en commun Benjamin Franklin, Mozart, Heinrich Himmler… et Hugo Pratt ? En apparence peu de choses ; tous étaient pourtant francs-maçons. La franc-maçonnerie dévoilée reconstitue l’histoire de cette société, établie partout dans le monde, ouverte à toutes les religions ainsi qu'aux aux femmes (pas trop, tout de même). Sa préhistoire se situerait à Reims au XIIIe siècle, mais ce n’est que quatre cents ans plus tard qu’elle commence à se structurer, en Écosse. Secrète, l’organisation sera successivement accusée d’être liée aux Templiers, aux Illuminati et aux Protocoles des sages de Sion. Il faut reconnaître que les canulars de Léo Taxil, qui l’a décrite comme une secte sataniste, n’ont pas aidé.
Arnaud de la Croix traite le sujet en mettant en scène une série de dix-huit biographies présentées sous un mode humoristique. Le cercle admettant des membres provenant d’univers très variés, l’auteur a distribué les rôles de façon à illustrer la grande diversité géographique, sociale et religieuse de sa composition. À l’instar de l’auberge espagnole, les sociétaires retrouvent dans la loge maçonnique ce qu’ils y apportent, le meilleur comme le pire. En neuf pages, le scénariste raconte la vie d’un compagnon et dévoile les liens qu’il entretient avec la mystérieuse assemblée. Ces courtes saynètes ne permettent pas toujours de pleinement apprécier la contribution de chacun ; pour tout dire, elles laissent souvent le lecteur sur sa faim. Chaque segment est par ailleurs accompagné d’un texte jetant un éclairage historique sur les gens et les événements.
Le dessin de Philippe Bercovici supporte bien le projet. Son trait caricatural, vivant et sympathique, affiche une forme de sobriété. L’artiste accepte de jouer un rôle de soutien et ne cherche pas à voler la vedette au propos, par exemple en multipliant les clins d’œil et les gags visuels. Pas plus qu’il n’y aura de savantes constructions ; les planches sont en effet pour la plupart sagement divisées en trois bandes de deux cases.
Le titre de l’ouvrage est presque trompeur. L’album ne révèle pas ce qu’est la franc-maçonnerie ; à travers une collection de portraits, il arrive cependant à en tracer les contours.