Résumé: Comme un vent de liberté
Aïdée, Pénélope et Zora habitent en colocation. Elles sont souvent confrontées à des réflexions en apparence anodines mais teintées de sexisme. Lorsqu'Aïdée se heurte publiquement aux propos machistes de son prof des Beaux-Arts, c'en est trop pour Pénélope à qui Aïdée se confie. Très engagée, Pénélope refuse de laisser passer cet incident... Les filles taguent leur première vulve chez le professeur. Galvanisées par cette expérience, Aïdée, Pénélope et Zora savent désormais comment réagir face aux comportements machistes. Peu à peu, les vulves fleurissent là où la violence de genre frappe une femme, une soeur, une voisine... Aïdée garnit son dessin de fleurs colorées et y ajoute un slogan : "Vulve victorieuse, Vulve heureuse"... Leur mouvement est né. Les vulves pailletées commencent à faire parler d'elles. Les réseaux sociaux et même certains médias s'emparent du phénomène. Un ami met le groupe en garde : cela peut s'avérer dangereux. Mais les filles ont l'impression de rendre justice à leur manière. De par leur action, elles gagnent aussi en assurance dans leur vie personnelle. Mais il suffit d'un tag de trop pour que tout bascule... Alors que leur identité est démasquée, elles sont victimes d'un déferlement de haine. Menaces, intimidations, harcèlement... jusqu'où iront leurs détracteurs ? Comment vont-elles sortir de cette spirale d'ultra violence ? Piégées, les filles ne sont ni protégées ni préparées à cette autre réalité...
Le duo Aurelle Gaillard et Francesca Marinelli fait son entrée au catalogue Glénat avec ce roman graphique résolument moderne, qui aborde avec réalisme des questions d'actualité à travers la trajectoire de trois jeunes femmes indépendantes. Avec leurs personnages bien ancrés, les autrices interrogent les limites de la liberté d'expression mais aussi les rouages du harcèlement à l'ère des réseaux et l'impunité des haters. Une pépite audacieuse et enthousiasmante, à lire sans modération.
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rois colocatrices, victimes à des degrés divers et sous différentes formes de ce qu’il convient de nommer la société patriarcale se lancent dans le militantisme pictural. La première fois, un peu bourrées, juste pour se défouler, en peignant une vulve chez un prof de fac injuste qui profites de son petit pouvoir. Face à cette première victoire symbolique, nos trois héroïnes vont récidiver jusqu’à ce que les choses deviennent hors de contrôle.
Aventure politique sur la nécessité de lutter en groupe et de créer du collectif, cette BD dégage quantité de joie, de douceur et d’énergie. Les trois personnages principales sont bien introduites dans leurs singularités : elles ne viennent pas du même milieu, n’ont pas les mêmes métiers ni les mêmes aspirations. Mais elles se retrouvent toutes dans une sororité qui leur permet de créer du lien et de monter une action, dans un premier temps à une échelle très modeste avant que cela prenne de l’ampleur. Les situations décrites, si elles dressent un panorama des violences sexistes et sexuelles un peu théorique (l’excès de pouvoir, l’agression sexuelle, la remarque sexiste anodine, l’homophobie), sont amenées de manière naturelle dans le récit et via les proches qui gravitent autour du trio, sans que cela ne paraisse artificiel. Le récit d’Aurelle Gaillard est au final bien construit, crédible, et le lecteur prend plaisir à suivre les péripéties de ce trio d’activistes pictural.
En effet, c’est bien par le dessin que leur combat démarre, par la représentation et l'exposition d’une image pourtant anodine : la vulve féminine comme un plaidoyer de couleur, d’amour et de poésie. La lutte est ici avant tout poétique. Francesca Marinelli réussit par son trait à insuffler une dynamique indéniable à ses personnages, à l’image de la couverture où elles courent, le pot de peinture débordant.
Les Fauves rappelle que la joie puise dans l’action, le mouvement et surtout le collectif. Cette jolie BD sur l’engagement féministe donne la pêche pour s'impliquer sur ce sujet ou sur un autre. En ces temps troublés, cette lecture est utile et enthousiasmante.