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rouillard dense, froid vif contraignant la majeure partie des parisiens à rester chez eux et à se coucher tôt, absence de flic sur le terrain suite à une grève générale, toutes les conditions sont réunies pour le crime parfait. C'est ce que se dit Esbirol, libraire de son état, en cette fin d'hiver 1959 en suivant l'acteur Gaston Malinguet rentrant chez lui après sa représentation de "L'oncle du quai de Conti". Assassinat ou seulement tentative, ces faits seront-ils relatés dans l'Etrangleur dont le n°1 vient de paraître ?
Le secret de l'étrangleur permet à Tardi d'offrir bien plus que la simple adaptation de Monsieur Cauchemar de Pierre Siniac. L'idée est venu de son éditrice : Pourquoi ne pas faire plus qu'un album ? Pourquoi ne pas profiter de l'occasion pour
prépublier le récit sous la forme d'un journal, qui, en plus d'un épisode, serait agrémenté d'articles et de chroniques ? L'entourage de l'auteur (Pierre Lebedel, Michel Boujut et Dominique Grange) a donc prêté sa plume pour faire vivre le journal L'étrangleur le temps de 5 numéros mensuels. Outre les 14 premières pages du secret de l'étrangleur, on peut y lire : une chronique cinéma, un article sur la grève des policiers qui sévit et un reportage sur la guerre d'Algérie. L'éditorial tourne évidemment autour du sujet principal et renforce l'ambiance du Paris des années 50/60 si bien rendue par l'auteur. Il agrémentera même l'histoire par des articles mettant en avant les évènements des épisodes précédents. Et il en sera ainsi jusqu'en juillet prochain.
Tardi démontre encore une fois tout son amour pour la ville lumière et les ambiances glauques et délétères des ruelles parisiennes sous le brouillard. Nestor Burma n'est pas loin, il ferait son apparition que le lecteur ne serait pas plus surpris que ça. La mise en scènes est toujours aussi travaillée, avec une introduction des personnages savoureuse, entre le tragique et le burlesque. On se prend à aimer ce libraire dont on ne connaît ni les antécédents ni le mobile qui le pousse à suivre un acteur qu'il vient de voir sur la scène d'un théâtre. Est-ce un tueur en série, est-ce une vengeance préméditée ? Suite au prochain numéro.
Originalité éditoriale et qualité bédéistique se rejoignent sous la plume de Jacques Tardi et les presses de Casterman. Les curieux vont s'arracher L'étrangleur, les moins impatients attendront sagement le mois d'octobre 2006 pour lire Le secret de l'étrangleur, l'intégral de 70 pages.