Résumé: Après avoir sauvé sa professeure d'art d'un assaillant armé à l'école, Manuel Soto doit faire face au Syndrome Post Traumatique. Pour lutter contre son anxiété, il utilise l'appareil photo de son téléphone portable pour trouver les points d'ancrage qui lui permettent de garder les pieds sur terre. Ses journées sont monotones et solitaires, jusqu'à ce que dans le cadre d'un projet scolaire, il fasse équipe avec ses camarades de classe, Sebastian et Caysha. À leur contact, le jeune collégien qui découvre la campagne, s'ouvre à la beauté de la nature et finit par y trouver le réconfort dont il a besoin...
Un album délicat et généreux dans lequel l'autrice dépeint avec finesse les sentiments adolescents dans cette vie isolée que leur impose la ruralité.
C
'est la rentrée pour Manuel et ses camarades. S'ils sont contents de retrouver les cours et surtout les copains, l'adolescent reste sur la réserve. Revenir dans sa salle d'arts plastiques là où sa prof a été agressée est une véritable épreuve pour lui. Et ce ne sont pas ses séances chez la psy ou avec sa mère qu'il croise entre deux gardes, qui l'aideront à évacuer définitivement ce à quoi il a assisté. Heureusement, il va se lier d'amitié avec Sebastian et Caysha.
Traiter des conséquences d'un drame, qui plus est lorsqu'il concerne des enfants, est toujours risqué quelque soit le médium. Avec cet album, Niki Smith, plutôt habituée aux récits érotiques (Friends, Quelques touches de désir) puise dans son enfance pour aborder avec intelligence le thème de la reconstruction. L'histoire démarre après l'attaque dont la prof a été victime. Ni elle, ni son agresseur n'en sont des personnages centraux, pas plus que l'acte en lui-même. Ce qui intéresse l'autrice est la manière dont son héros, témoin malgré lui et sauveur qui s'ignore, va surmonter son stress et les crises d'angoisse auxquelles il est sujet depuis l'agression. Dessiner ces moments par le biais de cases en noir et blanc à la mise en scène bien trouvée, ces moments plongent le public dans le même tourment que son héros.
Le reste du temps, l'artiste use d'un trait rond pour peindre son univers rural, l'habiller de couleurs douces et apporte un soin particulier à la lumière. Les soutiens médical et familial sont évidemment mis en avant, mais c'est surtout l'amitié qui va prévaloir. Le chemin est long heureusement, le tact dont font preuve Caysha et Sebastian est exemplaire tandis que leur joie de vivre s'avère une bouffée d'oxygène pour le jeune homme. Petit à petit, celui-ci s'ouvre à ses comparses, les découvrent en retour. Chacun va partager le hobby de l'autre ; celui de Manuel possède une vertu thérapeutique essentielle dans sa reconstruction. Avec patience, à l'image des nombreuses séquences contemplatives, les gamins s'appréhendent et s'apprivoisent. Les longs silences comme les regards en disent autant que des dialogues, souvent très justes.
Niki Smith réalise un très joli album. Fluide, plein de pudeur et de justesse, L'Espace d'un instant se révèle comme une ode à l'amitié et aux petits riens qui font le sel de la vie et permettent d'avancer même face aux épreuves les plus effroyables.
La preview
Les avis
Erik67
Le 25/04/2024 à 07:32:54
Ce titre se passe dans le Midwest américain où l’on va suivre Manuel qui a vécu un traumatisme en sauvant sa professeur d’art plastique d’un homme armé. Il faut dire qu’aux USA, le port d’arme étant autorisé voire encouragé par certains politiciens, on peut massacrer sans difficulté toute une classe. Ce genre d’événement arrive bien trop souvent ces derniers temps.
Il s’agit de le suivre dans cette période post-traumatique où il doit combattre son anxiété. Certes, il est entouré par l’amour de sa mère et il est suivi par une psychologue mais c’est dans l’amitié qu’il parviendra véritablement à surmonter cette épreuve de la vie.
Sur le plan graphique, on notera une grande élégance avec un souci des décors qui procure le respect envers l’auteure Niki Smith qui après avoir vécu une grande partie de sa vie au Kansas et au Texas a décidé de vivre en Allemagne ce qui n’est pas plus mal.
J’ai bien aimé le traitement graphique qui change totalement quand notre jeune garçon est en proie à ses crises d’angoisse qui lui refont vivre l’agression dont a été victime sa professeure en arrêt de travail. Il y a une véritable audace dans la mise en scène et cela fonctionne à merveille pour faire retranscrire les sentiments.
A noter également des paysages très plat à savoir de grandes fermes très isolées qui occupent un espace assez important. C’est dans l’isolement de ces lieux qu’il pourra véritablement se reposer et notamment chez son nouveau copain Sébastian. On est plongé dans un cadre typiquement rural mais à l’américaine.
Il y a beaucoup de bienveillance et de tendresse dans ce joli album qui se lit d’une traite malgré son nombre élevé de pages. Une lecture qui m’a fait vibrer l’espace d’un instant.