Info édition : Avec jaquette.
Sens de lecture original (de droite à gauche). Manga plastifié incluant un badge ("The ancient magus bride").
Résumé: Un conte noir et fantastique entre Tim Burton et The Ancient Magus Bride.
Il existe deux mondes : "L'extérieur' où vivent les non humains, des créatures pouvant jeter un sort rien qu'en touchant quelqu'un, et "L'intérieur' où vivent les humains. La petite Shiva vit pour une raison inexpliquée avec un non humain dans "L'extérieur'. Il veille sur elle et se garde de la toucher, car elle deviendrait instantanément une sombre créature inhumaine. Il cache en fait à la petite fille qu'il l'a recueillie et qu'il possède une lettre de ses proches. Shiva ignore tout de l'hostilité des deux mondes et son "Maître' comme elle l'appelle fera tout pour la protéger .
Elle avait l'interdiction de toucher qui que ce soit... La main noire et froide qui s'est posée sur la joue de Sheeva n'est pas celle du Professeur...
À présent, la fillette est-elle condamnée à se transformer elle aussi en une créature de l'extérieur ? Le Professeur est horrifié de n'avoir pu la protéger, elle qui est si fragile... Et qui est donc cette "maman' vers qui la créature de l'extérieur souhaite conduire la fillette ?
Ils sont aussi différents que le jour et la nuit... Et malgré tout ce qui les sépare, malgré les ténèbres qui les entourent, ils vont écrire petit à petit une fable tous les deux...
U
n rayon de soleil caresse la joue de Sheeva et la réveille. Elle s'était endormie dans son coin préféré de la clairière. Bientôt, une créature étrange la rejoint, le professeur, son protecteur. Afin de faire le plein de provisions, ils se dirigent tous deux vers un village déserté. C'est alors que la petite fille aperçoit, non loin, une silhouette ressemblant à son ami. Des mots lui reviennent soudain en mémoire : "si jamais tu rencontres un être de l'extérieur, tu ne dois surtout pas le toucher ; sauve-toi !". Pourquoi cette mise en garde de sa tante ? Quand est ce que celle-ci va venir la chercher ?
L’Enfant et le Maudit , conte intemporel, est l’histoire de deux pays, deux populations et surtout deux personnages fortement liés mais que tout oppose. D'un côté, le "professeur" : un individu très grand, entièrement noir et aux allures de diable cornu. De l'autre, Sheeva, une fillette lumineuse, pleine d'innocence et de candeur. Le symbolisme est omniprésent. Le sous-titre "Siúil a Rún" fait référence à une chanson traditionnelle irlandaise : une femme se lamente sur l'absence de son amant parti poursuivre sa carrière de militaire ; "siúil" se traduit par « Marche ! »et "a rún" est un terme affectueux. Cette précision prend pleinement son sens à la lecture, tant elle exprime l'attachement profond entre deux personnes. Cette relation est pourtant interdite et dangereuse car une malédiction menace les interactions contre-natures.
Nagabe, dont c'est la première oeuvre traduite en France, démarre très fort avec cette série aussi étonnante qu'originale. Il crée un univers intimiste où la dualité domine. La différence, la peur de l'autre ainsi que les préjugés sont illustrés admirablement dans une mise en scène immersive. La tension monte subtilement, au gré des révélations distillées intelligemment. Le ton passe de l'insouciance à l'inquiétude latente, de la confiance à la paranoïa. L'évolution de ce duo improbable est empreinte de sensibilité et d'humanité, d'autant plus que le reste du monde semble désespérément sombre et cruel. Cette noirceur est contrebalancée par la fine poésie qui se dégage du récit et n'en ressort que plus belle.
Le graphisme, très particulier, captive d'emblée. Le trait fin, épuré, fait penser aux miniatures d'autrefois. Les trames travaillées et les contrastes de noirs et blancs sont utilisés brillamment dans les jeux d’ombre et de lumière et participent activement à l'instauration de l'atmosphère sibylline. La présence discrète de petites onomatopées parfait l'ensemble.
Cette fable délicate et sombre ne fait que débuter mais, d'ores et déjà, captive grâce à un duo touchant, une aura de mystère inquiétante, l'ensemble étant superbement illustré (en témoigne l'avant-dernière case). Tout est dit.