A
u premier regard, le petit Napoléon est tombé sous le charme de la grande Eloïsa. Faisant fi de leur différence de taille – quatre-vingt centimètres quand même -, il a décidé de la séduire. À force de patience et d’ingéniosité, Cupidon remportera la partie.
Eloïsa et Napoléon repose sur une délicate couche de douceur et de sérénité. Cristina Florido effleure cette histoire avec une légèreté incomparable. Un bouquet de fleurs, un petit-déjeuner romantique, une petite danse improvisée, la vie des deux tourtereaux est à peine divulguée aux yeux des lecteurs. Tel un courant d'air qui soulève subrepticement un rideau, la scénariste murmure plus qu'elle ne raconte. Cette esquisse de portrait est néanmoins d'une grande précision. Pour atteindre son but, Florido a dépouillé volontairement son récit au maximum, ne conservant qu'une fine ligne narratrice centrée sur ses deux héros. Alors que l'album pourrait sembler un peu vide et rempli d'un romantisme un peu béat, il s'avère touchant grâce à la finesse des observations et à la sincérité des propos.
Les lecteurs qui avaient repéré Francisco Ruizge dans des titres un peu « musclés » comme La geste des chevaliers dragons, Luxley ou Prométhée risquent d'être passablement surpris en feuilletant cet ouvrage. Le dessinateur propose une approche au trait, presque brut, qui semble directement sortir d'un carnet de croquis. Fausse impression néanmoins, le travail de Ruizge, qui rappelle par moments Sempé, est en fait des plus subtils et parfaitement adapté au scénario. L'artiste manie particulièrement bien la mise en page. Grandes illustrations, petites cases carrées arrangées en moule à gaufre, incrustations d'image dans l'image, ces changements incessants de points de vue offrent une dynamique incroyable aux planches.
Histoire d'amour toute simple, racontée avec beaucoup de maestria, Eloïsa et Napoléon est tout à fait recommandable.