Résumé: 2122, quelque part en Amérique du Nord. Le monde d'avant n'est plus qu'un lointain souvenir. Les derniers vestiges de la civilisation, recouverts par le sable, se sont presque effacés pour laisser place au désert. Dans ce décor de fin du monde, un homme marche, accompagné par un géant. Puis il rejoint une communauté et demande à parler à son chef. Il lui annonce une prophétie : un jour, un homme sans visage viendra.
Lui seul pourra mettre un terme à la souffrance humaine. Cette communauté, c'est celle du jeune Joshua. En conflit avec son père, en butte aux morsures de l'amour et à l'emprise de la violence, il tente de trouver sa place. Il s'interroge sur ses origines et sur les étranges pouvoirs qu'il détient. Pour lui, l'heure de la révélation est imminente... Dans ce deuxième volet d'une fresque de science-fiction en quatre tomes, Jaouen Salaün nous plonge au coeur d'un univers fascinant, entre rêve et cauchemar, entre Mad Max et Akira.
Une fresque servie par un trait enchanteur, une imagination onirique et des couleurs éblouissantes.
L
’attirance que Sylvo éprouve à l’égard de sa demi-sœur est contre-nature. Leur père, Vittorio, le menace en conséquence. Seulement, son importance au sein de la communauté décline. Et le patriarche le relègue derrière son propre héritier malgré ses penchants "sadiens". C’est que le charme de Margot est une malédiction. Elle ne laisse pas indifférent Josh dont le rôle dans le clan est négligeable. De génération en génération, le triangle amoureux semble se répéter. Lorsque se présente aux survivants un individu modeste accompagné d’un colosse étrangement vêtu. Ceux-là demandent audience afin d’annoncer la prophétie suivante : « Un jour, arrivera un homme sans visage. Et il viendra en aide à tous ».
Le voile se lève sur l’objet de la tétralogie Elecboy de Jaouen Salaün. Avec ce deuxième opus, sous-titré Révélations, l’artiste poursuit sa dramaturgie shakespearienne délivrant des clefs de lecture inattendues. Les liens sentimentaux exposés jusqu’alors sont brinquebalés, plongeant les protagonistes dans un état émotionnel exacerbé. Ces retournements, bien cadencés, concernent le public notamment parce qu’ils apparaissent subtilement au verso d’une page ou au terme d’une planche impaire. D’autant que ces relations familiales complexes font souffrir le héros au point d’éveiller en lui une autre essence. L’influence de l’art séquentiel japonais apparaît en relais de l’intrigue, tant par les thématiques de science-fiction (la robotique, l’intelligence artificielle, l’âme de la machine) que par la représentation de l’action (lignes de vitesse, scènes de combat et explosion de force). Logiquement, les villes américaines désolées et les manifestations surnaturelles font penser à Néo-Tokyo dévasté ou bien à numéro 28. Projection d’un chroniqueur en manque d’Akira ou véritable référence à Katsuhiro Otomo ? Faites-vous une idée !
Les déambulations au sein de cet univers post-apocalyptique ravivent, cette fois-ci avec certitude, les souvenirs de Mad-Max. Le détournement d’accessoire vient souligner l’arrêt de la production et à l’inverse l’opulence du monde, avant qu’il ne s’effondre. Cette patine visuelle est judicieusement captée en laissant respirer les fonds de vignettes. Les décors sont présents et finement posés, mais souvent l’environnement prend le pas sur les bibelots ; ou à l’opposé, l’amoncellement d’objets est synonyme de puissance et déborde en un lieu. Contrairement au volume inaugural, ce climat est moins utilisé pour apporter un enjeu narratif que pour émerveiller la rétine.
Au surplus, la trame religieuse interpelle. Dans ce melting-pot de bonnes intentions, la culture amérindienne est exploitée à contre-emploi afin de démontrer que le pouvoir déshumanise. Là, où habituellement, l’animisme est vertueux et en communion avec la terre. Ici, le chamanisme est despotique. Quant à l’I.A, elle se réfère à la mythologie grecque sans que cet état ne prenne sa pleine mesure. Le bédéiste a encore deux tomes (aux titres probablement aussi évocateurs que bibliques) pour crédibiliser ses choix et certainement renforcer sa problématique : qu’est-ce qui rend humain, la chair ou les émotions ?
Protéiforme, Elecboy est un récit « trans-genre » en équilibre admirablement soutenu par une pellicule cinématographique !
Lire la chronique de tome 1,Naissance
Les avis
thieuthieu79
Le 20/11/2021 à 17:27:32
Ce second opus est encore plus maitrisé.
Quel plaisir de se replonger dans cet univers graphique puissant et absolument époustouflant.
C'est criant de vérité et vraiment immersif.
Les personnages, leur visages mais surtout leur expressions sont encore une fois puissantes d'authenticité.
L'histoire se poursuit et le voile se lève sur le passé de Joshua et de son père. Les révélations sont surprenantes, inattendues et annoncent la couleur pour les 2 derniers albums de la tétralogie.
La présence d'êtres mystérieux, mélange entre robot, IA, extra-terrestres et dieux donne une autre dimension très plaisante à cette histoire.
J'ai encore une fois été séduit, happé et conquis par le travail remarquable de Jaouen Salaün.
Au vue des révélations finales, J'espère juste que la suite ne s'éparpillera pas et saura rester terre à terre...
Shaddam4
Le 30/10/2021 à 09:19:05
Avec trois parutions cette année Jaouen Salaün est prolifique! Le premier tome de son Elecboy avait marqué les esprits en début d’année, notamment par une partition graphique franchement impressionnante bien qu’un peu monotone dans les atmosphères. Avec un trait et une colorisation réalistes appuyés sur un design fort réussi, son Mad Max mâtiné d’Oblivion avait à moitié convaincu du fait d’un frein très appuyé sur la progression et la révélation des secrets. On avance dans une totale continuité avec ce second opus puisque dans une même structure scénaristique on démarre très fort avec une belle séquence d’action SF autour d’un voyageur très puissant avant de dérouler les affres du héros et de ses pouvoirs cachés. Globalement tout y est pour nous accrocher, avec un abominable méchant, des relations familiales complexe, une SF ambigüe entre éléments très technologiques et un environnement tout à fait wastlands. Pourtant l’auteur continue d’appuyer sur le frein pour des raisons qui m’échappent, comme cette rencontre entre les anges et le héros, brutalement coupée avant qu’elle ne s’affiche… La force du hors champ peut être redoutablement efficace quand elle est utilisée avec parcimonie. Ici elle casse le rythme en nous frustrant tout le long dans notre envie de rentrer dans le vif du sujet. Salaün semble assumer ce faux rythme. Cela n’enlève pas les grandes qualités de cette série post-apo mais l’empêche malheureusement d’être un blockbuster immédiat. Frustrant je disais…
Lire sur le blog:
https://etagereimaginaire.wordpress.com/2021/10/27/bd-en-vrac-21-raven-2-elecboy/
Erik67
Le 27/10/2021 à 10:25:28
Nous voilà plongé dans le monde de 2122 soit à peu près 100 ans de plus que notre époque actuelle. La Terre a bien changé car elle a été victime d'une catastrophe d'envergure laissant place à une terre aride brûlé par le soleil où une communauté tente de survivre.
L'introduction met en scène le combat d'espèce d'entité qu'on a encore du mal à identifier: est-ce une intelligence artificielle ou bien des extraterrestres ? Le récit va revenir à quelque chose de plus classique en suivant le parcours d'un adolescent Joshua. C'est suffisamment intéressant pour que l'on suive son histoire qui n'est pas très clair au niveau de sa filiation.
J'ai bien aimé la perspective et le graphisme de cet univers un peu particulier. A noter une couverture particulièrement réussi dans le réalisme. On sent une certaine maturité dans le dessin mais également dans l'écriture du scénario. C'est une BD très prometteuse.
BudGuy
Le 30/09/2021 à 15:00:00
Un deuxième opus visuellement dans la continuité du précédent, c’est toujours aussi sublime que cela soit au niveau des décors qu’au niveau des personnages !
Le scénario lève enfin une partie des mystères et éléments d’intrigue précédemment posés, c’est beaucoup plus intéressant et digeste au niveau du récit.
Je ressens toujours cette sensation de trop plein, que cela soit par rapport aux références et aux idées qui se télescopent pour le meilleur comme pour le plus étrange des mélanges (Mad Max, Akira, les rites amérindiens, la mythologie grecque, les IA).
Au demeurant un bon album qui en annonce un prochain qui sera sans doute dantesque à souhait.