Info édition : Noté "Première édition". cahier graphique en fin d'ouvrage
Résumé: Coup de théâtre sur l'île de Cap Tourneboussole !
La disparition soudaine du vieil Arthur Stiegmann va bouleverser la vie de ses quatre héritiers : Cecil, cocher sans-le-sou et père de famille indolent ; Magdalena, irascible noble déchue ; Carl Christ, capitaine à la soif insatiable d’aventures ; et enfin, Wilmina, la seule à vivre à Tourneboussole et à avoir été élevée par cet homme acariâtre et cruel. Réunis pour la première fois par le testament d’Arthur, les quatre cousins vont rapidement découvrir ses effroyables secrets…
A
rthur Stiegmann est décédé et personne ne le regrettera. Par contre, peu de gens savent que cet aubergiste austère était en fait le terrifiant pirate Auguste Shermann, dont la réputation sanguinaire perdure encore des années après sa «retraite». Qui dit pirate, dit trésor ! Ses héritiers, Wilmina, Magdalena, Cecil et Carl ont été appelés par maître Arbus Frequento pour l’ouverture du testament du défunt. "Où est l’or ?" hurlent-ils à l’unisson. La situation n’est pas si simple leur répond le notaire. Les piastres et les doublons seront pour ceux qui réussiront à les trouver. La chasse est immédiatement engagée et, en digne descendants de cette terreur des mers, les cousins ne se feront aucun cadeau !
À partir d’un classique canevas de course à l'échalote, Lorenzo Palloni a construit une saga improbable remplie de coups de théâtre et de révélations ahurissantes. Au centre des débats, une des meilleures distributions du moment : Wilmina, la fille du corsaire au tempérament effacé et écrasé par son rôle de mère dans une société machiste. Magdalena, sa copie en mode négatif : une force de la nature insolente, graveleuse, pétulante et tyrannique à souhait. Cecil, le gentil cocher obligé de sortir de sa zone de confort pour faire entendre sa voix. Sans oublier, le baroque Carl, un dandy esthète qui court l’aventure afin de combattre l’ennui et la lassitude. Leur point commun hormis leur lien de parenté ? Ils sont prêts à tout dans le but de décrocher la timbale et d'accéder à la richesse. Mauvaise foi, perfidie et trahisons, le ton du scénario sent bon la poudre et le non politiquement correct. Le tout est pimenté de dialogues pas piqués des hannetons (merci Magdalena, même si les autres membres de cette famille ne sont pas en reste). De plus, même si l’humour et les rebondissements rythment ces péripéties, le scénariste réussit à glisser ici et là quelques éléments sociétaux percutants et rarement vu en BD, comme les secondes pensées de Wilmina sur la maternité par exemple.
Visuellement, Veronica Guaglio a choisi un style coulé et cartoonesque. Le choix est judicieux, car il apporte du ressort et de l’intensité à cette histoire abracadabrante. Corollaire à ce parti pris virevoltant, ce qui est gagné en dynamisme est un peu perdu en précision et une certaine confusion se fait sentir dans certaines scènes. L’important est que ça file et explose au fil des chapitres. L’animation des personnages est à relever, les faciès se distordent, les glottes éructent et les dents grincent à qui mieux mieux. Le découpage, évidemment nerveux, sait heureusement s'accorder des pauses sous la forme de grandes illustrations essaimées au fil des pages. Celles-ci permettent à la dessinatrice de se mettre en valeur et au lecteur de respirer. Merci pour lui.
Exploitation futée d’un genre pourtant ressassé, plusieurs niveaux de lecture intelligemment étagés et une gouaille hilarante tant narrative que visuelle, Effroyable Shermann est un album «plein». À découvrir d’urgence sans attendre la prochaine marée !