Résumé: Deux femmes sauvagement assassinées, sans mobile apparent, ont été découvertes rue Morgue, dans leur appartement condamné de l'intérieur. Bon nombre d'individus ont été interrogés, mais rien n'a transpiré qui puisse jeter quelque jour sur l'affaire. L'esprit de déduction d'Auguste Dupin saura-t-il résoudre l'énigme qui tien en échec la police officielle ? Double assassinat dans la rue Morgue est une nouvelle parue en avril 1841 dans le Graham's Magazine. C'est la première apparition du détective inventé par Poe, le chevalier Dupin, qui sera mis en scène dans deux autres enquêtes : le Mystère de Marie Roger et La Lettre volée. Edgar Poe est considéré comme l'inventeur du genre policier.
L
a multiplication des adaptations de romans en bande dessinée peut susciter deux types de réactions radicalement opposées. La première consiste à apprécier cet exercice de style qui permet de (re)découvrir l'œuvre d'un auteur célèbre, à trouver par ce biais le moyen idéal de transmettre aux plus jeunes le goût de la lecture de grands classiques et enfin à saluer l'initiative de J.D. Morvan, directeur de la collection Ex-Libris des éditions Delcourt. La deuxième, en revanche, se base principalement sur des regrets. Celui du manque d'imagination des scénaristes, de l'apparition de plus en plus fréquente de doublons en un laps de temps très court (par exemple Tom Sawyer aux éditions Soleil vs Tom Sawyer aux éditions Delcourt) ou du faible intérêt de retranscrire certains textes trop descriptifs.
Double assassinat dans la rue Morgue a déjà récemment été adapté. ( chez Akileos). Le récit est celui d'une enquête policière, passionnante, mais complexe, puisque la solution de l'énigme repose exclusivement sur les capacités d'analyse d'Auguste Dupin. Autant l'histoire originale d'Edgar Allan Poe est fascinante, autant la mise en images est poussive et n'apporte pas vraiment de valeur ajoutée, bien au contraire. Le dessin de Fabrice Druet n'est pas en cause puisque sa description du Paris du début du XXe siècle est globalement réussie, ses décors sont fouillés et ses personnages bien maîtrisés.
La nouvelle de l'écrivain américain est un texte austère qui joue avant tout sur les ambiances lourdes, parfois glauques, dont chacun se fait sa propre interprétation, avec ses propres référends. Visualiser ce genre de récit tronque finalement son travail qui devait mener le lecteur, lentement, aux sommets de l'angoisse. Ces difficultés à retranscrire l'horreur se retrouvent aussi dans les adaptations de Lovecraft. Est-ce à dire que tous les récits fantastiques ou d'épouvante sont intranscriptibles dans le 9ème art ? Certes non. D'autant que l'album de Morvan et Druet, pris isolément, est plutôt plaisant à lire. Simplement, il souffre de la comparaison avec l'original.
Pour en revenir au postulat de départ et éviter tout manichéisme, l'approche concernant Double assassinat dans la rue Morgue pourrait être celle-ci : à conseiller pour découvrir l'œuvre d'Edgar Allan Poe, malgré le doublon et le faible intérêt de retranscrire ce texte.