Résumé: Retrouvons notre journaliste Léonore qui enquête sur un homme peu ordinaire du Grand-Siècle : Jean-Baptiste Delaveyne. Jeune mondain frivole l'abbé Delaveyne change radicalement de vie à l'instar de Charles de Foucauld. Brillant esprit au coeur tendre, ce curé de campagne nous fait penser à Coluche, à l'abbé Pierre et aussi à saint Louis en ouvrant des cantines et des hôpitaux pour les plus démunis et en créant des écoles pour filles désoeuvrées. Mais Dom Delaveyne va encore plus loin, il enrôle des jeunes filles et fonde la "Congrégation des Soeurs de la Charité de Nevers" afin de secourir tous les pauvres, à l'exemple du Christ.
L
’étudiante en journalisme Léonore assiste à une représentation à Broadway. La comédie musicale concerne Marie-Bernarde Soubirous, sujet de la première aventure de la jouvencelle. À travers ce spectacle, elle découvre l’implication de la sainte de Lourdes en faveur de la congrégation des Sœurs de Nevers. Ni une ni deux, elle décide de quitter les États-Unis et de prendre la direction de la France. Elle atterrit alors à Clermont-Ferrand, où un taxi l’amène dans le chef-lieu de la Nièvre au 35 rue Saint Guildard, chez les Sœurs de la charité. Débute ainsi sa découverte de Jean-Baptiste Delaveyne, fondateur émérite de cette communauté religieuse féminine enseignante et hospitalière de droit pontifical.
Après Bernadette & Lourdes, L’enquête (prix international de la BD chrétienne du festival d'Angoulême 2021), les éditions Artège réitèrent et proposent une seconde équipée à destination d’un public jeunesse portant le sobriquet Dom Delaveyne, le saint de Nevers : L’Enquête. Les auteurs Yvon Bertorello et Alban Guillemois utilisent une nouvelle fois leur reporter en formation qui, disons-le, ne mène pas véritablement des investigations. Dès son arrivée, elle rencontre une interlocutrice issue de cette association catholique qui s’avère être un véritable puits de science. S’ensuivent des dialogues creux qui n’explorent pas la personnalité des actrices. Les échanges servent de passe-plats visant à nourrir la biographie de Dom Delaveyne – de son attrait pour les fastes mondains à son engagement envers les plus démunis. Pis encore, l’héroïne profane introduit, parfois, elle-même une anecdote. Son affirmation est alors reprise par la Mère Supérieure Générale des Sœurs, alourdissant la lecture. Si le prêtre bénédictin présente un réel intérêt tant théologique que culturel, il n’en demeure pas moins que l’exposition de son action dessert, en l’espèce, le récit. Ce dernier n’est pas romancé. Il fait notamment l’économie d’embûches qui permettent de valoriser la protagoniste principale et de susciter l’empathie du lecteur.In fine, l’album énonce béatement l’histoire du père Delaveyne par succession de tranches de vie artificiellement reliées entre elles.
Le graphisme proposé par Alban Guillemois (Louis la Lune, Prince de Sassoun, L'ile aux mille mystères) est diamétralement opposé à la narration. En effet, la mise en images démontre un tempérament artistique et un parti prix fort. Les visages sont exagérément allongés, les phylactères prennent la forme de grossiers parchemins et les émotions sont limitées à la portion congrue. En parallèle, le décorum est travaillé en courbes à la manière de la vision organique de l’architecte Gaudi. Le gaufrier embrasse également le mouvement intégrant opportunément des armoiries. Le tout est joliment valorisé par des aquarelles jaune, rose et orangé ; et, par moments, quelques tons bleutés et austères rappellent les années ascétiques du moine de l’ordre de saint Benoît.
Dom Delaveyne, le saint de Nevers : L’Enquête n’assume pas la promesse portée par son titre. L’objet est de belle facture, le visuel est osé et le thème est porteur de valeurs universelles. Néanmoins, le traitement de la paire de scénaristes n’offre pas les garanties escomptées.