K
atchan souffre d'une maladie particulière : il est capable de se disperser dans l'air, de s'éparpiller en une infinité de minuscules fragments. Après avoir laissé sa meilleure amie Azami, puis Shizuku, une jeune femme mal dans sa peau et éprise de lui, il parcourt le monde au gré des vents, pour arriver finalement en Afrique, dans un petit village isolé. Azami, elle, n'a pas oublié Katchan, mais elle a appris à vivre sans lui, et surtout sans trop espérer son retour. Elle finit par se passionner pour la photographie.
Alors que le tome précédent se focalisait plutôt sur les aspects négatifs du pouvoir de Katsuhiko, Oda tente dans celui-ci d'en explorer les causes et les conséquences, et de les confronter à son héros. Ainsi Katchan se rematérialise-t-il en pleine Afrique noire, aux côtés d'une jeune femme qui le prend pour l'esprit de son village. On peut penser qu'au sein de cette petite communauté reculée Katchan va enfin apprendre à vivre en société, mais il est ici naturellement différent des autres. Non par choix, mais par son apparence et son statut d'esprit dans la tribu. Hideji Oda, s'il manipule ici des clichés assez éculés sur l'Afrique noire et les méfaits de la civilisation, réussit parfaitement à toucher le lecteur par le personnage de Katchan, constamment en retrait dans le tome 1 et que l'on découvre finalement ici. Les différents lieux où il se retrouve (Amérique, puis un retour au Japon), s'ils rendent le récit un peu erratique et inégal par l'accumulation d'idées reçues, ne sont finalement qu'un décor cherchant à recréer l'instabilité du jeune garçon, son impuissance à vivre en société.
Oda ne cherche pas à attendrir le lecteur à tout prix avec son manga. Pourtant, il touche profondément par la justesse de certains portraits : celui de son héros, bien entendu, mais aussi celui de la jeune africaine, ou de ce fils de Yakusa qui ressemble étrangement à Katchan. L'onirisme prend beaucoup plus de place dans ce volume deux, allant parfois jusqu'à envahir la réalité. Témoin cet Indien vêtu d'une peau d'ours qui tente d'aider Katchan à contrôler son pouvoir. Tout cela rend le récit plus décousu, les transitions et les ellipses plus floues, mais lui donne surtout l'apparence d'une quête intérieure.
Cette conclusion à Dispersion possède un charme immense, par la profondeur des personnages et la manière très personnelle de l'auteur de raconter son histoire. Un récit entre rêve et réalité, où tout est possible, même le pire.