Résumé: Gongju, une jeune femme plutôt réservée et originaire de la ville de Daegu, a abandonné ses études puis a travaillé comme serveuse en attendant de pouvoir trouver du travail dans la presse à Seoul. Elle et la très enjouée Hing-yeon se sont rencontrées sur Internet grâce à un blog et sont liées d’amitié une fois Gongju installée à Seoul. Après quelques années de galères à travailler comme rédactrice pour des tabloïds ou des sites de commerce, Gongiu apprend à Hong-yeon qu’elle a décidé de quitter Séoul pour retourner vivre dans sa ville natale et s’occuper de sa mère malade. Au même moment, Hong-yeon annonce à son amie qu’elle est enceinte et qu’elle va se marier alors qu’elle a toujours été contre l’idée du mariage. La vie de famille va être particulièrement éprouvante pour la jeune femme confrontée à sa belle-famille et à un mari peu bienveillant. Les deux femmes vont se suivre à travers une correspondance régulière. Les histoires délicatement intriquées de Hong-yeon et Gongju donnent un aperçu de la réalité de la société coréenne, conservatrice et patriarcale.
R
égulièrement, Gongju et Hong-yeon se retrouvent autour d'un verre pour discuter de tout et de rien mais, aujourd'hui, chacune a une nouvelle importante à annoncer à l'autre. Ces décisions vont marquer un tournant dans leur vie et bouleverser leurs visions de l'avenir dans cette Corée du sud contemporaine qui reste complexe, car empêtrée dans les contradictions.
Quelle place possède la femme ? Song Aram pose et se pose la question dans ce livre d'inspiration biographique, à travers l'édification de deux portraits féminins qui se croisent. Tout les oppose (personnalité, rapports aux hommes, cadre familial) et pourtant leur amitié s'avère indispensable pour supporter la lourdeur de leur existence : l'une est réservée, emprisonnée dans sa relation avec sa mère et sa grand-mère et ses petits jobs humiliants qui ne mènent qu'à pas grand-chose ; la seconde est exubérante et frivole, pourtant elle se retrouve coincée dans un mariage où la belle-famille l'étouffe. La force de l'expérience personnelle de l'auteure se ressent et imprègne de justesse et d'authenticité le texte. Ce panorama délicat et intimiste de la condition des jeunes Coréennes éclaire grandement les lecteurs et donne un aperçu de la réalité conservatrice, patriarcale et castratrice, ainsi que de la pression des anciens sur les nouvelles générations qui peinent à s'épanouir.
Simple et expressif, le graphisme en noir et blanc possède un certain charme qui laisse la place à l'expressivité et à l'ambiance, plus qu'aux détails. Certains phylactères surchargent un peu la composition dans les cases, mais l'ensemble se révèle relativement lisible et agréable à lire.
Analyse pertinente d'une nation qui peine à trouver sa place entre modernité et traditions, Deux femmes propose une vision réaliste et viscérale tout à fait intéressante pour se rendre compte du malaise amer régnant dans ce pays d'Asie qui reste encore méconnu.