A
près quelques albums exotiques et autobiographiques, Tronchet retourne à ses premières amours avec une suite aux Deux cons sobrement intitulé Les Ducon & Ducon. Titre sans appel, rictus ébahis de circonstance et gag abyssal en primeur, l’homme de Béthune semble en forme et annonce le programme dès la couverture.
Le Nord-Pas-de-Calais s’appelle maintenant Les Hauts de France, l’humour du créateur de Jean-Claude Tergal est resté le même. Ode plus ou moins bienveillante à l’idiotie, exploration sans pitié de la pensée cartésienne chez les déficients intellectuels et simple plaisir du bon mot, le scénariste a gardé une plume bien acérée. Oui, il vogue dans des sillons déjà moult fois retournés pas ses soins que ce soit dans les tribulations d’un célèbre aventurier d’appartement ou les débâcles successives des Damnés de la Terre associés. Résultat, certaines situations commencent à sentir la redite. Heureusement, il arrive souvent à trouver une chute ou une remarque nouvelle pour boucler ses récits. Tel un mélomane récitant infatigablement ses gammes, la mélodie est reconnaissable, un peu répétitive par moments, mais toujours agréable à retrouver.
Si le propos sent bon une certaine nostalgie, la manière a bien évolué. Le dessinateur a atteint une maîtrise impeccable de la couleur directe. De lâché et parfois hésitant à ses débuts, le trait est à présent précis, presque nerveux. Le découpage a suivi une trajectoire identique et est devenu, là aussi, précis et parfaitement en place. Dans le même temps, le style n’a pas bougé et est immédiatement identifiable. Tronchet démontre désormais une maturité technique impressionnante.
Rigolo, d’une bêtise sans fond et malgré tout jouissif, Les Ducon & Ducon échoue inlassablement à réinventer la roue ou le fil à couper le beurre. C’est tant mieux, c’est comme ça qu’on les aime !