Le 31/10/2025 à 11:24:24
Longue et dramatique histoire que celle de Dessous! Première œuvre de l’auteur Bones prévue en trois tomes, la série a fait l’objet d’un de mes premiers billets sur le blog, il y a six ans, après une publication des deux premiers tomes en financement participatif chez feu Sandawe. C’est un peu le pire qu’il puisse se passer pour un auteur au commencement de sa carrière que de voir son éditeur disparaître, avec toute la ribambelle de problèmes de droits et de rachats qui l’accompagnent… Fort enjoué par cette proposition frenchie d’une lovecrafterie mignolienne matinée de Jules Verne, je rongeais mon frein de voir un jour sortir la conclusion lorsque l’on apprit que le décidément incontournable Komics initiative venait à la rescousse de ce dessinateur naufragé avec une ressortie de la série en format intégrale intégrant donc la conclusion inédite. Avec un apéritif sous la forme du confus Blood Moon réalisé entre temps, nous voilà en librairie pour ce qui mérite toute votre attention. Les deux premières parties ayant fait l’objet d’un billet (lien c-dessus) je m’attarderais sur la troisième partie. Dernière remarque : j’avais déjà noté un choix malheureux concernant le papier entre les deux premières parties, Komics et l’auteur n’ont malheureusement pas choisi de profiter de la réedition pour utiliser un papier glacé qui aurait mieux convenu au dessin aux superbes encrages et clarifié une ambiance que Bones semble avoir voulu vaporeuse. Laissons à César ce qui lui appartient… Attention spoilers (si vous n’avez pas lu les deux premières parties) Une des qualités de ce récit est sa construction et sa chronologie qui s’assument longues et radicales. Alors que la première partie se déroule dans les tranchées de la Grande Guerre, la seconde prend place un an après l’Armistice et la troisième en 1936. Le problème des récits lovecraftiens est souvent incapacité à dépasser le décorum monstrueux. Dans Dessous, Bones à l’inverse avance vite, par de larges ellipses, transposant son héros revenu d’entre les fous dans un entre-deux Guerres post-apocalyptiques après que le méchant de la seconde partie ait lâché les larves des créatures d’Outre-espace sur le monde. Nous découvrons ainsi Paris détruite et un reste de résistance parcourant les Cieux à bord d’immenses dirigeables armés. Mais les faibles humains ne résistent pas longtemps face aux « Kaijus » de l’époque et doivent se réfugier auprès de la dernière puissance qui semble pouvoir encore résister; l’Union Soviétique de Staline. Utilisant amoureusement le design militaire cyclopéen de l’armée soviétique, l’auteur joue avec ses personnages et cassant tout ce qu’il peut et en naviguant entre ses deux personnages que sont le héros et le très réussi allemand steampunk Baren laissé sur la Ligne Siegfried, dernière protection désespérée contre les monstres. L’ambiance n’est bien évidemment pas joyeuse et ressemble à une chute dans l’Abîme de l’humanité aux airs de voyage initiatique pour le héros à l’itinéraire très intéressant. Totalement effacé dans la seconde partie, il revient à bras le corps pour assumer un statut presque démiurge quand on réalise un lien unique entre son esprit et l’une des créatures. Réussissant joliment sa conclusion, Bones, respecte un cahier des charges conséquent et ses propres envies qui fort heureusement rejoignent celles des lecteurs. Excellent scénariste (bien plus que sur Blood Moon), l’auteur évite les chausses-trapes nombreuses de ce projet dont les seules crispations viennent de l’absence de traductions des dialogues en allemand et en russe, plutôt agaçants. Pour le reste on a une sorte de version lovecraftienne et fantasmée à la mode 1920 de la Guerre des Mondes d’une grande cohérence. Une belle prise de cet automne qui n’a pas à rougir face aux têtes de gondoles des grands éditeurs. Je vous invite vivement à tenter l’expérience… avant de voir la carrière de ce bel auteur décoller enfin. Lire sur le blog: https://etagereimaginaire.wordpress.com/2025/10/08/dessous/Le 12/10/2025 à 22:51:48
Une intégrale pas tout à fait au niveau des attentes suscitées depuis des années - surtout pour les souscripteurs Ulule comme moi. Dans le premier opus, Bones debut, ce se sent, il le dit lui même, c’est plein de défauts. Prometteur, mais parfois illisible ou abscons. Dans le deuxième, le lore est plus développé, on voit du pays, c’est bourré de promesses un peu plus tenues. Il y a également une belle ouverture pour la suite. Dans le troisième opus uniquement inclus dans l’intégrale, Bones a mûri. On sent le temps qui a passé et ses capacités accrues. Mais … j’ai l’impression qu’il a fini la série uniquement pour honorer (à contrecœur ?) la campagne Ulule faite il y a des années. C’est le service minimum, et c’est dommage. Certaines planches sont sublimes, et d’autres bâclées. Côté scénario c’était chouette par contre. Ses priorités étaient - et sont tjs - ses autres albums. On l’a vu avec le retard… Petit détail fâcheux : je suis un gros contributeur ulule mais pour le coup KI c’était moyen. Ils ont énormément couvert le retard de plusieurs années de Bones, c’est plus ou moins normal, quoique pas transparent, mais derrière il n’y a pas eu de compensation. De plus, pour la version collector, j’avais payé 60€ à l’époque. Mon exemplaire n’est même pas signé... Dès parution de l’intégrale, on trouvait des versions collector à 45€ sur le site KI et signées en plus … bref … Ça reste néanmoins du bon fantastique d’horreur avec une belle patte d’un auteur à suivre.BDGest 2014 - Tous droits réservés