Résumé: Ce sixième et avant dernier volume de l'anthologie que nous consacrons à l'oeuvre de Yoshiharu Tsuge présente sept histoires initialement parues entre 1981 et 1985. Alors âgé d'une quarantaine d'années et père de famille, Yoshiharu Tsuge publie désormais au comptegouttes.Plus apaisées que dans les précédents volumes, ses histoires se concentrent désormais sur le quotidien et les souvenirs de jeunesse. Il évoque ainsi à plusieurs reprises le chaos qui règne lors de la reconstruction du Japon d'après guerre où encore la période où il fût assistant pour Shigeru Mizuki. Abandonnant les thématiques du rêve, de la vie de couple ou des voyages, Désir sous la pluie présente plusieurs récit humoristiques et dévoile une nouvelle facette de l'oeuvre complexe de Yoshiharu Tsuge.Les sept histoires présentées dans ce volume sont les dernières « nouvelles » que réalisera Tsuge avant de se consacrer à l'écriture de L'Homme sans talent, le chef-d'oeuvre qui clôturera sa carrière. Une préface de Xavier Guibert revenant sur l'ensemble de l'oeuvre de Yoshiharu Tsuge introduira l'ouvrage, le livre sera également complété d'une postface de Léopold Dahan, traducteur de cette anthologie, afin de remettre en contexte chaque histoire présente dans ce volume.
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'autofiction introspective de Tsuge se poursuit dans cet avant-dernier volume de l'anthologie qui lui est consacrée. Désir sous la pluie réuni sept nouvelles, publiées entre 1981 et 1985 dans Garo. Elles seront les dernières réalisées par le gekigaka, avant qu'il se lance dans le saisissant Homme sans talent.
Les récits suivent le cheminement de l'auteur. C'est pourquoi, dans ce tome, les histoires semblent plus apaisées que dans les albums précédents. Reprenant plusieurs moments de l'existence du mangaka, elles lui permettent d'aborder des thèmes forts. Le premier d'entre eux est la présentation du quotidien difficile dans le Japon d'après-guerre. Entre les combines du marché noir, la prostitution, l'entassement de migrants coréens dans des bidonvilles, les lecteurs découvrent le point de vue de Tsuge, qui oscille entre résignation et indignation. Dans le récit d'ouverture, Gamin, le mangaka utilise le personnage qu'il avait créé pour l'usine de galvanoplastique d'Ôba afin de projeter ses souvenirs d'adolescent. Cela permet de constater à nouveau son attraction pour le manga et le début de ses névroses.
La famille est la deuxième thématique au cœur de ce recueil. Que cela soit celle qu'il fonde, ou celle dysfonctionnelle de son enfance ou de son ami, la cellule familiale est omniprésente. Enfin, la place de la création de la bande dessinée est également mise en avant dans plusieurs récits. L'artiste use de prête-noms afin de traiter des rapports, pas toujours au beau fixe, entre les mangakas et leurs assistants.
Comme pour tous les mangas publiés dans la collection Pierre, cet opus bénéficie d'une préface qui met en contexte le travail du dessinateur. Celle-ci est signée par l'éminent Xavier Guilbert. Le tome se termine par une postface de Léopold Dahan, qui a œuvré à la traduction. Ce dernier propose une rapide analyse de certains chapitres, axée sur l'attitude de Tsuge face au manga. Les amateurs apprécieront.
Désir sous la pluie conclut avec brio et beauté l'ensemble des nouvelles dessinées par cet immense artiste, inventeur du watashi-wa manga. Une fois de plus, les éditions Cornélius gâtent le lectorat francophone avec la parution d'ouvrages cultes et patrimoniaux du neuvième art japonais.