Résumé: Depuis sa rencontre avec le grand écrivain Bernard Chalenton, la vie de Claudine semble s'être arrêtée. Ne compte plus pour elle qu'un livre de cet auteur, Monsieur Blanche, qu'elle lit et relit sans relâche depuis près de vingt ans. Sa fille, Colette, qu'elle a abandonnée à la naissance, décide tout de même d'essayer de communiquer avec cette femme psychologiquement fragile. Étrangère à tout, sauf à l'univers obsessionnel qu'elle a construit autour de ce roman, elle ne manifeste d'intérêt qu'à la création littéraire de sa fille, autre objet de fantasme qu'elle alimente inlassablement. Colette va accepter d'entrer dans la névrose de sa mère pour communiquer avec elle. Mais ce qui n'était au départ qu'un substrat thérapeutique, va prendre une dimension inattendue lorsqu'entre en scène Bernard Chalenton, le fameux écrivain, dont l'aura ne parvient à dissimuler la perversion. Le voyage littéraire auquel Colette avait accepté de se prêter se transforme en une lutte larvée avec cet homme auquel elle est bien plus liée qu'elle ne le croit. Une lutte qui autorise toutes les armes, de la séduction au mensonge, en passant par la manipulation. Une oeuvre psychologiquement dense, qui interroge la part d'inné et d'acquis tapie dans les rapports de force entre des individus tour à tour rivaux, dominants et dominés.
É
crivain à succès Bernard Chalenton joue à la star dans les salons du livre. Sûr de son charme, il arrive toujours à séduire une fan ou deux lors des séances de dédicaces. Attention néanmoins, le petit jeu de la séduction est parfois ravageur, autant pour la proie que pour le chasseur.
En plus de trente-cinq ans de carrière et presque autant d'albums, Jean-Claude Servais (Orval, La belle coquetière) s'est forgé un style immédiatement reconnaissable, autant sur le plan graphique que sur les thèmes abordés. Mêlant les forces de la nature à la destinée humaine, ses récits mettent les personnages à l'épreuve. Épreuves morales où face à l'adversité, les protagonistes se retrouvent régulièrement dans des situations à devoir révéler, à eux-mêmes ou aux autres, leurs plus profonds instincts sauvages. Immanquablement, Servais, illustrateur dans l'âme, offre alors de merveilleuses compositions sylvestres et giboyeuses.
Le dernier brame reprend, un peu trop à la lettre, les éléments habituels du créateur de L'assassin qui parle aux oiseaux. Le côté stylistique ne se discute pas, Servais maîtrise parfaitement son art et rend une copie de grand talent. Le brame, les sous-bois, l'immanquable demoiselle dans le plus simple appareil sont tous admirablement rendus. En fait, c'est l'intrigue en elle-même qui pèche par sa simplicité. Cela n'aurait été qu'un détail si les personnages avaient été plus convaincants. Pas de chance, la métaphore psychologique, également un peu trop simpliste, n'apporte que peu de consistance au scénario et peine à rendre cet opus mémorable.
Ce « Servais classique » manque un peu d'audace pour vraiment convaincre, pourtant tous les ingrédients sont là.
Les avis
Erik67
Le 05/09/2020 à 00:09:17
J'aime toujours autant les histoires que nous conte Servais. Il y a ce mélange avec la nature qui est toujours au coeur de ses oeuvres. On ressent toujours une ambiance un brin forestière.
La nouveauté réside sans doute dans le fait d'un récit de vengeance plus adulte et qui prend un peu plus de place que d'habitude. Il est dommage d'avoir des passages totalement littéraires et un brin pompeux qui n'apportent finalement pas grand chose. Néanmoins, cela reste une bd de qualité avec un graphisme toujours aussi soigneux.
Il y a incontestablement une simplicité du scénario qui aurait mérité un développement plus élaboré pour sortir du classicisme habituel. C'est tout de même assez captivant pour attirer l'attention du lecteur.