Info édition : Contient Dept. H (2016) #1-6 + un sketchbook (9 pages) en fin d'album.
Résumé: Un meurtre a été commis dans une station scientifique basée à 9 000 mètres de profondeur. L'homme le plus populaire au monde, le professeur Hari Hardy, sorte de commandant Cousteau des temps modernes, a été tué. Et c'est Mia, la propre fille du professeur, qui doit découvrir le meurtrier parmi sept assassins potentiels. Or, le temps est compté : quelqu'un (le tueur ?) a saboté la base et d'ici 24 heures elle sera inondée et les preuves détruites alors que les nouvelles en provenance de la terre, 9 000 mètres plus haut, ne sont pas plus rassurantes. Ce récit d'espionnage commence par un meurtre mystérieux pour se resserrer rapidement dans une course tendue contre le temps. Peu à peu les caractères des protagonistes se révèlent, le passé remonte à la surface, les liens secrets, les amours, les haines.
M
ia Hardy, scientifique chevronnée a malgré tout la tête dans les étoiles. Enfin, avait, puisque depuis que son employeur, l'ESSRM, lui a demandé d'aller faire la lumière sur les évènements qui frappent sa station sous-marine phare, Dept H, elle a plutôt les pieds dans l'eau et les mains dans la... . Sabotage de la base et meurtre de son père, rien que ça. Et pour couronner le tout, le temps lui est compté pour sauver ce laboratoire hors norme dont elle connaît, depuis l'enfance la quasi totalité des membres. La plongée s'annonce asphyxiante.
Matt Kindt fait partie de ces auteurs en vue au talent multiforme ; aussi à l'aise avec des productions personnelles typées « indé » qu'avec les super-héros (il est l'un des auteurs attitrés de l'éditeur Valiant dont Bliss Comics a repris les publications dans nos contrées). Dept H se classe dans la première catégorie et installe un peu plus le créateur de Du sang sur les mains (chez Monsieur Toussaint Louverture) parmi les artistes à suivre.
S'il avait déjà démontré, au début de sa carrière, son goût pour les thrillers (2 sœurs) ou les récits d'espionnage (Super Spy), cette nouvelle série d'anticipation, en quatre volumes, semble enfoncer le clou et hausser le niveau. Le cadre tout d'abord, entre Abyss et Le crime de l'Orient Express ; le confinent et l'enquête, voilà pour les contraintes. Contée de manière chronologique, sa trame s'épaissit via une narration, interne, en voix-off. Le lecteur progresse avec Mia, récolte les indices avec elle, partage ses doutes et questions et ainsi s'immerge pleinement dans l'enquête. Ce fil principal est enrichi par des flashback qui développent la psychologie des personnages au compte-gouttes. Le scénariste sait ménager ses effets en distillant petit à petit les informations et faire monter progressivement la tension. Celle-ci est justement accentuée par l'urgence provoquée par le sabotage. En plus des interrogations qu'il lève - Qui ? Pourquoi ? Comment ? - cet élément ajoute une pression (!) qui ne fait que croître au fur et à mesure de l'avancée de l'héroïne. Fausses pistes, doutes et incertitudes, implications personnelles, sentimentales, familiales ou amicales, c'est un véritable whodunit qui doit trouver sa résolution avant que toute l'installation ne soit sous l'eau et signe la fin des recherches paternelles.
Cette mise en place et l'attention portée aux ambiances comme aux personnages n'est pas sans rappeler le travail de Jeff Lemire. Cette filiation au canadien (pour qui il a dessiné les épisode 26 à 28 de la saga Sweet Tooth) se prolonge également dans le dessin. Un trait lâché et faussement naïf, qui en déroutera plus d'un, mais d'une efficacité rare. Ce parti-pris graphique est accompagné d'une mise en page tout simplement bluffante. Jouant sur le découpage - un coup en grandes cases verticales, un autre en (splendides) doubles-pages ou encore en gaufrier de six ou neuf vignettes - le dessinateur utilise toutes les possibilités offertes par le medium pour appuyer ses effets, habiller les atmosphères ou cadencer sa narration. Les couleurs reviennent à Sharlene Kindt, son épouse, qui opte pour l'aquarelle. Tantôt bichromie pour aider à saisir les changements de ligne temporelle, tantôt polychromie, elles soulignent à merveille la beauté des séquences aquatiques ou les ambiances, nettement plus oppressantes, dans la station ou en sortie.
Huis clos étouffant, thriller familial, complot scientifique, Meurtre en grande profondeur mélange les genres et brouille les cartes avec brio et ouvre Dept H sur de belles promesses. Pour le lecteur que le trait atypique de Matt Kindt ne rebutera pas, le deuxième tome est annoncée pour juin : vivement !
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Les avis
Aramis90
Le 19/08/2018 à 21:16:37
Le dessin est très moche, et j'ai lâché l'affaire au 1er fascicule paru en VO. La lecture des pages présentées en preview ici suffiront à convaincre d'éventuels indécis.
Dommage, l'idée semblait bonne et j'espérais mieux du scénariste, mais son dessin n'est pas au niveau du tout.