Résumé: Manon Séchan consulte une psychologue car elle subit des violences de la part de son compagnon. La réalité est difficile à admettre et il est encore plus difficile d'en parler. Mais la thérapie et l'aide de la famille et des amis vont permettre à la jeune femme de tourner la page et de reconstruire une histoire.
M
anon ne va pas super bien. Pourtant, son job à la crèche lui plaît énormément, les petits sont adorables, et sa coloc' Lulu est géniale, joyeuse, toujours présente pour l'aider à refaire surface. Après 18 mois à ruminer, Manon a pris la décision d'aller voir une psychothérapeute : elle a envie d'avancer, d'aller mieux.
Depuis 2000, le 25 novembre est la journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes. Cette année, pour accompagner la manifestation, les éditions Des Ronds dans l'O sortent le nouvel album de Thibaut Lambert qui, après la maladie d'Alzheimer, a choisi de mettre en lumière un mal qui touche plus d'une femme sur trois dans le monde, la violence.
S'appuyant sur un trait simple et efficace - dans la lignée de ce qu'il propose habituellement - et une bichromie rose et noir, le dessinateur donne toute la dramaturgie nécessaire à son histoire sans en rajouter. Ce dessin clair et la justesse de ses dialogues ajoutent à la force du propos. Prenant pour héroïne une jeune active d'aujourd'hui fraîchement diplômée, l'auteur d'Au coin d'une ride, s'intéresse à l'après d'une relation où les coups et les brimades ont occupé autant de place que les câlins et la tendresse. Sans voyeurisme ni pathos, mais surtout en évitant de se placer en juge du « pourquoi elle reste ? », il dresse le portrait d'une femme prisonnière de son amour bien après son terme. Il décrit une Manon attachante, vivante, sociable qui, presque malgré elle, s'est retrouvée coupée de son partenaire.
L'intérêt n'est pas tant dans la fin de cette relation que dans la manière dont elle se relève, dans la résilience dont elle fait preuve pour passer, une à une, les étapes de la reconstruction. La verbalisation, la prise de conscience de son besoin d'aide, l'envie de recommencer à vivre, tous ces moments-charnières où l'importance de l'entourage - la famille, les amis et d'un homme « normal » - est primordiale. Ce qui saisit, c'est cette fragilité qui l'assaille tout au long de sa convalescence et la contradiction quasi permanente entre le besoin de faire à nouveau confiance et l'extrême méfiance derrière laquelle elle se protège. Souvent à deux doigts de renoncer, elle ira au bout de son cheminement et ne sera, paradoxalement, délivrée de ses démons qu'en s'y confrontant une ultime fois, avant de réussir à aimer de nouveau. Peut-être un peu court pour bien symboliser l'importance que revêt le temps dans ce cheminement, l'album parvient à atteindre son but.
Sur un thème malheureusement totalement actuel, De rose et de noir surprend par sa force et sa sobriété. Thibaut Lambert réussit à livrer un album positif tout en attirant l'attention sur ces femmes qui souffrent en silence. Une belle manière d'apporter sa pierre à un combat universel.
La page de l'OMS sur la violence à l'encontre des femmes.
Les avis
Erik67
Le 30/08/2020 à 14:15:53
J'ai beaucoup aimé ce récit très intimiste car il est très bien construit avec une héroïne très attachante. On est tout de suite au coeur du sujet que celui des violences au sein d'un couple.
Pour autant et sans vouloir porter un jugement sur notre notre héroïne, je remarque que les femmes sont souvent attirées par de très mauvais garçons (pour ne pas dire des connards) et ensuite, elles viennent se plaindre sur leur situation certes à juste titre.
Quelque fois, cela se voit à 100 mètres à la ronde mais non, elles sont attirées comme un aimant à ce qui est malsain. A leur décharge, il y a parfois des gens très sournois qui cachent bien leur mauvais jeux. Toute violence à l'égard de nos princesses est à proscrire. Pas de pardon, ni de pitié pour celui qui a commencé. Tolérance zéro et à mettre au cachot.
Sur le plan graphique, une jolie bichromie qui joue sur le rose et le noir portant le titre de ce roman graphique. J'ai apprécié également le fait que l'auteur ne va pas jouer dans les violons en ajoutant un peu plus dans une espèce de dramaturgie. Cet ouvrage montre surtout la reconstruction d'une femme, étape après étape, après l'horreur de ce qu'elle a vécu. Les histoires d'amour peuvent être compliquées mais là où il y a de la violence, il n'y a plus de place pour l'amour. A méditer.